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C'est un entreprise proprement pédagogique qu'Antoine Dresse entreprend en proposant une cartographie méthodique des notions, des figures et des controverses qui structurent la pensée politique de droite. Chaque entrée fonctionne comme une fiche claire et synthétique, où l'on croise Joseph de Maistre, Alexis de Tocqueville ou encore Carl Schmitt.
Objectif : définir, contextualiser, puis relier les concepts à des querelles contemporaines. Mais aussi montrer les continuités et les ruptures au sein de cette vaste galaxie intellectuelle, et mettre en scène les tension internes, entre conservatisme, libéralisme, souverainisme et identitarisme.
En rendant visibles les arguments, leurs limites et, plus que tout, leurs implications pratiques, Antoine Dresse encourage à la réflexion... avant de retourner à l'action.


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En s'imposant progressivement comme médiation obligée au monde, le numérique affecte, comme aucune technique auparavant, les relations pratiques naturelles que nous entretenons avec les objets, les autres, les institutions, ainsi qu'avec soi-même.
Dans cette substitution de la technique aux relations naturelles se joue une nouvelle économie de la vie psychique, qui n'est rien de moins que la vie de l'esprit.
Avec quelles conséquences ?
Une conférence qui s'inscrit dans le cadre du Séminaire "Éducation et soin à l'ère du numérique", animée par Cynthia Fleury et Camille Riquier.


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C'est en compagnie de Stefou Xenomancie qu'est étudié en profondeur le courant intellectuel souterrain mais influent des lumières sombres, un mouvement qui remet radicalement en question les fondements de la modernité politique. Inspiré par le penseur Nick Land, théoricien d'une technocratie élitiste, le débat s'articule autour d'une critique acerbe de la démocratie, de l'égalitarisme et du progressisme. Ce courant prône un retour à des structures sociales hiérarchisées, tout en intégrant les avancées technologiques pour façonner un futur où l'efficacité prime sur les idéaux humanistes. Entre rejet des utopies égalitaires et fascination pour un capitalisme débridé, ces idées interrogent : une société gouvernée par une élite technoscientifique est-elle viable, voire souhaitable ?
L'échange aborde également des thèmes connexes comme la providence technocapitaliste, où le marché et l'intelligence artificielle sont perçus comme des forces quasi divines de sélection sociale, ou encore la guerre hybride, où les conflits futurs se joueront autant sur les champs de bataille que dans les réseaux numériques. Des références à la gnose, à la double prédestination calviniste ou aux mythes faustiens viennent éclairer cette vision d'un monde où le pouvoir se concentre entre les mains de quelques-uns, tandis que la masse, dépossédée de son autonomie, n'est plus qu'un rouage d'un système dépassant l'entendement humain. Entre dystopie et prophétie, cette discussion invite à décrypter les dérives possibles d'un futur où technologie, pouvoir et spiritualité s'entremêlent de manière troublante.


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La bêtise n'est pas seulement une défaillance individuelle de la raison, mais un phénomène social et politique qui interroge les fondements mêmes de la démocratie. Dans une époque où les fake news et les discours démagogiques prospèrent, comment penser le lien entre bêtise et espace public ?
C'est à cette question que répondent, chacun à leur manière, trois figures majeures de la modernité littéraire et intellectuelle : James Joyce, Robert Musil et Karl Kraus. À travers leurs œuvres – Ulysse, L'Homme sans qualités ou Les Derniers Jours de l'humanité –, ils dissèquent les mécanismes de la stupidité organisée, révélant comment elle se nourrit des failles du langage, des illusions de la technique et des passions tristes de la masse.
Pascal Engel nous invite à explorer cette généalogie littéraire et critique, où la raison, loin d'être un rempart infaillible, doit sans cesse se confronter à ses propres limites pour préserver l'idée même de démocratie.


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Nous ne sommes pas avant tout des "moi", des âmes ou des consciences désincarnées, mais des êtres humains à part entière, inscrits dans le monde par notre corps. C'est l'idée que Claude Romano examine, à la lumière du débat contemporain entre les théories de l'animalisme et celles fondées sur la continuité psychologique de la personne, en interrogeant la validité philosophique des expériences de pensée qui dissocient le corps du sujet.
Claude Romano s'attache à montrer que ces expériences — telles que les greffes cérébrales imaginaires ou les transferts d'esprit — relèvent davantage de la fiction que de la philosophie.
En confrontant la tradition phénoménologique à la philosophie analytique, il propose de réhabiliter une conception incarnée de l'identité, dans laquelle la conscience, le langage et la subjectivité ne se séparent jamais de l'existence biologique.
En somme, son intervention plaide pour une redéfinition du sujet humain : non pas un esprit logé dans un corps, mais un être vivant dont la pensée même naît de son appartenance au monde.


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Si pour certains d’entre nous, la fin du monde sonne comme un horizon lointain, comme une idée vague d'une catastrophe fictive, pour d'autres elle est une possibilité concrète, matérielle, prédite par les données d'une science plus avancée que jamais. La progression fulgurante du réchauffement et du dérèglement climatique provoque ce qu'on appelle l'éco-anxiété, une anxiété liée à la destruction des possibilités d'existence pérenne de l'espèce humaine sur une terre vouée à devenir inhabitable. Si cette prophétie des temps modernes semble inédite, et l'est du fait de sa rationalité incontestable, nous ne sommes pas les premiers à vivre avec l'idée d'une fin du monde imminente.
Outre les élucubrations millénaristes divers et variés entourant le passage à l'an mil, à l'an 2000 ou encore au 21 décembre 2012, les premiers chrétiens vivaient eux aussi la fin du monde comme quelque chose d'imminent, qui serait annoncé par le retour du Christ et qu'ils verraient de leur propres yeux. Si l'église catholique à perdu aujourd'hui ce goût prononcé de l'eschatologie, il n'en demeure pas moins que les grands philosophes, loin de se moquer de cette idée archaïque, en font un objet de pensée central. Emmanuel Kant lui-même, explique dans La Fin de toutes choses qu'il est dans la nature de la raison humaine de vouloir penser la fin, dans la mesure où il est impossible pour la raison de se représenter l'éternité.
Émission "Les nouveaux chemins de la connaissance", animée par Adèle Van Reeth.


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La "gigantomakhia peri tês ousias" ("gigantomachie autour de l'étantité", Sophiste, 246a), que met en scène le Sophiste entre les fils de la Terre et les amis des Formes, constitue moins une antinomie qu'une dialectique où chacun des termes est appelé à régler son rapport à l'être et au non-être, à l'âme et au corps, à la part visible et invisible du monde en fonction des positions de l'autre terme.
Cette dialectique est appelée à un grand avenir et traversera toute l'histoire de la philosophie jusqu'à nos jours, selon des modalités à chaque fois renouvelées, mais qui toutes renvoient aux questions initiées par les dialogues de Platon.
C'est à ce travail de la dialectique, à sa richesse problématiques, à sa fécondité intellectuelle, mais aussi à ses apories, à ses tours de passe-passe, voire à ses mystifications que Pierre Caye consacre cette conférence en revenant particluièrement sur les thèses de Proculs.


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En 1978, René Girard publiait Des choses cachées depuis la fondation du monde. Un livre dans lequel, six ans après l'avoir exposée dans La Violence et le sacré, il approfondissait sa théorie selon laquelle toute société humaine repose sur une violence qu'engendre la mimèsis d'appropriation, le désir mimétique de posséder ce que l'autre possède.
L'occasion pour l'anthropologue de détailler son interprétation du mythe d'Œdipe, sa théorie du mimétisme, une analyse de la bible avec des références à l'Apocalypse ou encore à la Passion du Christ. René Girard analyse les processus de sacrifice, de désignation du bouc émissaire sur lesquels se seraient fondées toutes les religions primitives. Enfin, il revient sur la relation avec la psychiatrie, les liens avec Freud et l'énorme apport de la littérature à son corpus théorique à travers les œuvres de Cervantès, Stendhal, Flaubert, Dostoïevski, Proust mais aussi celles de James Joyce et Virginia Woolf.
Émission "Chemins de la connaissance", animée par Roland Auguet.