Frantz Fanon, l'antiraciste (vraiment) universaliste. Avec Kévin Boucaud-Victoire pour Le Média.


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01.2023

Connaissons-nous vraiment Frantz Fanon ? Né en Martinique en 1925, puis arrivé en Algérie comme psychiatre, il meurt à 36 ans après avoir marqué son époque et l'Histoire comme peu de Français au XXe siècle. Essayiste, penseur majeur de la question coloniale et du tiers-mondisme, acteur des luttes de libération nationale notamment aux côtés du FLN algérien, Frantz Fanon continue d'influencer les chercheurs et brasseurs d'idées, dans les universités du monde entier.
Mais sa pensée reste assez floue, au point qu'on le présente parfois aujourd'hui comme un des inspirateurs des "identitaires de gauche". Or comme l'explique Kevin Boucaud-Victoire, Frantz Fanon est très loin de cette étiquette, quel que soit son contenu.
Et il a beaucoup de choses à nous dire. Il parle à notre époque et ses mots continuent d'être porteur d'une grande radicalité, des décennies après sa mort. C'est peut-être pour cela qu'il continue de faire peur, et est caricaturé voire occulté.

Beaufs et barbares : le pari du nous. Avec Houria Bouteldja et Louisa Yousfi pour Le Média.


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03.2023

Beaufs et barbares : le pari du nous, d'Houria Bouteldja, est récemment paru aux éditions de La Fabrique, quelques mois après Rester barbare, de Louisa Yousfi, chez le même éditeur. L
Elles reviennent d'abord sur les positions et l'apport du Parti des indigènes de la République (PIR), dont la contribution politique forme le contexte de leurs deux ouvrages. S'il a été très décrié, et en particulier accusé de communautarisme, le PIR est pourtant à l'origine du développement en France d'un antiracisme "politique", qui a pour la première fois pris à bras-le-corps les causes structurelles du racisme. De nombreuses catégories d'analyses désormais largement utilisées pour saisir les données du problème, à commencer par la notion de blanchité, ont été introduites par les militants "indigénistes".
En revenant sur la mauvaise réputation de l' "indigénisme", Houria Bouteldja et Louisa Yousfi rejettent les accusations d'homophobie ou de misogynie tout en expliquant pourquoi l'imposition de normes de vie extérieures obligées, dont l'émergence a correspondu à des enjeux politiques européens/blancs, peut constituer un surcroît de violence subi par des communautés déjà en situation de relégation à tous égards et miner plus encore leur capacité de survie dans la dignité.
Avec Rester barbare, Louisa Yousfi offre une méditation sur la condition des Français d'origines arabes et africaines à partir des références littéraires et musicales qui leur sont propres, loin de la culture légitime et des injonctions à l'intégration. Rejeter l'intégrationnisme, c'est, dit-elle, refuser de refermer la porte derrière soi en abandonnant à leur sort les familles du pays d'origine ou des "quartiers", et refuser de jouer le jeu d'une société capitaliste mortifère. Plutôt que l'intégration, donc, la libération ‒ laquelle implique aussi celle des Blancs en tant que parties prenantes de la domination postcoloniale.
Houria Bouteldja, de son côté, développe une réflexion historique et stratégique sur ce qui a jusqu'ici empêché les victimes du mépris de race et celles du mépris de classe, les "beaufs" et les "barbares", de faire cause commune contre la domination bourgeoise. La notion d' "État racial intégral", qu'elle construit à partir des pensées de Gramsci et de Poulantzas, lui permet de rendre compte d'une "collaboration de race" entre bourgeoisie et petits blancs qui ont longtemps eu des intérêts communs à la perpétuation de l'impérialisme. La radicalisation néolibérale du capitalisme a cependant des effets de plus en plus dévastateurs sur les classes populaires blanches, à tel point que les élites dirigeantes doivent redoubler d'effort pour stimuler l'islamophobie ‒ comme on l'a vu avec la loi "séparatisme" promue au lendemain de la crise des gilets jaunes ‒ de manière à prévenir la possible constitution d'une majorité alliant entre les perdants blancs et les indigènes.
Comment remplacer le "pacte racial" capitaliste-impérialiste et "abolir la race" pour construire une hégémonie décoloniale, nécessairement révolutionnaire ? Un tel projet imposerait l'émergence de véritables directions politiques et la constitution d'une autre "dignité blanche", non plus fondée sur un suprémacisme hérité du rapport colonial mais sur la reconstruction de communs, de valeurs et de styles de vie, loin du consumérisme et de la compétition économique comme unique culture.

Émission "On s'autorise à penser", animée par Julien Théry.Émission "On s'autorise à penser", animée par Julien Théry.

Qu'est-ce qu'un écrivain réac ? De Maurras à Houellebecq, le style et la droite. Avec Vincent Berthelier pour Le Média.


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09.2022

Le regain d'intérêt, en France ces dernières années, pour les écrivains très marqués à droite ou d'extrême-droite, à commencer par Maurras, est sans doute à rapprocher de l'immense succès de Michel Houellebecq, dont les romans déplorent un déclin des grandes autorités socio-culturelles du passé qui laisserait l'homme contemporain en mal de repères, livré sans remède à la dépression en contrepartie d'une liberté illusoire. Mais existe-t-il, au plan du style littéraire, une caractéristique commune et spécifique aux auteurs classables dans la catégorie "réactionnaires" ?
C'est la question sur laquelle se penche Vincent Berthelier dans un livre récemment paru aux éditions Amsterdam. Il y revient sur les liens entre classicisme et même purisme stylistique, ou au contraire inventivité des forme littéraires, d'un côté, et conservatisme ou fascisme. Le cas Renaud Camus, par exemple, paraît confirmer le lien entre passéismes stylistique et politique fixé par le modèle de Maurras, puisque Camus abandonne l'inventivité littéraire qui avait jusque caractérisé son oeuvre au moment où il s'engage dans son combat d'extrême droite. Le seul cas où la radicalité politique réactionnaire et la radicalité stylistique vont vraiment de pair est sans doute celui de Louis-Ferdinand Céline. Ce qui n'empêche pas Vincent Berthelier de proposer une très stimulante plongée dans l'histoire stylistique et politique de la littérature des XXe et XXIe siècle, où l'on croise entre autres Georges Bernanos, Marcel Jouhandeau, Marcel Aymé ou encore Cioran et Richard Millet.  

Émission "On s'autorise à penser", animée par Julien Théry.

Face au désastre qui vient : le communisme désirable. Avec Frédéric Lordon pour Le Média.


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03.2021

Le nouveau livre de Frédéric Lordon, Figures du communisme, est directement tourné vers l'action, ici et maintenant. Face à l'inhumanité du néolibéralisme, face aux désastres engendrés par un capitalisme dont plus personne ne peut douter qu'il est en train de rendre la planète inhabitable, que faire ? Telle est la question à laquelle l'auteur s'efforce de répondre. Par un exercice de méthode et de conséquence – à rebours du règne du déni et de l'inconséquence.

Émission "On s'autorise à penser.", animée par Julien Théry.

Nazisme et management : des logiques communes ? Avec Johann Chapoutot sur Le Média.


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05.2020

Historien du nazisme et de sa vision du monde, Johann Chapoutot a récemment fait paraître un essai dont la réception n'a pas été unanimement favorable : Libre d'obéir : le management, du nazisme à aujourd'hui.
C'est la lecture de l'abondante littérature nazie sur la Menschenführung, la conduite des hommes, qui a attiré l'attention de Johann Chapoutot sur les similitudes frappantes entre les discours de l'époque et ceux qui prolifèrent aujourd'hui aussi bien dans la sphère entrepreneuriale que dans celle du gouvernement néolibéral.
Il revient ici sur la démarche du livre et profite de l'occasion pour répondre aux objections qui lui ont été opposées.

Émission "La grande H.", animée par Julien Théry.

Le grand méchant Robespierre. Avec Yannick Bosc et Marc Belissa sur Le Média.


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06.2019

Avant même son arrestation et son exécution lors de Thermidor (juillet 1794), Maximilien Robespierre a été outrancièrement vilipendé et calomnié par les ennemis de la Révolution, en particulier par les presses royaliste et anglaise. Son élimination a été immédiatement justifiée par une diabolisation destinée à discréditer tout projet de démocratie réelle au profit d'un système représentatif reléguant le peuple à la passivité et laissant aux possédants le monopole d'un gouvernement "des compétences" mené en fonction de leurs intérêts.
En évoquant les différents regards successivement portés sur l' "Incorruptible" jusqu'à nos jours, les historiens Marc Belissa et Yannick Bosc montrent la permanence de l'enjeu politique essentiel qui s'est cristallisé autour de cette figure. Enjeu qui demeure on-ne-peut-plus actuel : la démocratie réelle, où l'action des représentants seraient strictement contrôlée par le peuple, est-elle possible ?

Émission "La grande H.", animée par Julien Théry.

Macron, l'incarnation du bloc bourgeois. Avec Bruno Amable sur Le Média.


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06.2019

Comment En Marche a capté l'électorat du bloc bourgeois ? Quelle stratégie opposer face à ce bloc, entre populisme, souverainisme, ou plutôt retour à une union de la gauche, façon programme commun ? Les gilets jaunes sont-ils l'expression de l'anti bloc bourgeois qui pourrait naître de la recomposition politique en cours ?
Pour tenter de répondre à ces questions, Théophile Kouamouo reçoit Bruno Amable, co-auteur avec Stefano Palombarini de L'illusion du bloc bourgeois.

Nietzsche et l'histoire, Nietzsche dans l'histoire. Avec Dorian Astor sur Le Média.


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07.2019

L'histoire est indispensable pour comprendre le présent : assurément... et voilà un lieu commun somme toute rassurant. Mais quelle(s) histoire(s), faite(s) par qui, et comment ? Y-a-t-il une manière neutre d'aborder le passé, ou plus recommandable que d'autres qui seraient trop orientées ou militantes ? Les historiens peuvent-ils s'ériger en arbitres des usages du passé – en particulier de ses usages ou instrumentalisations politiques ? Le savoir et l'érudition sont-ils en mesure de dire le dernier mot sur ce qui a eu lieu, et quelles seraient les conséquences de cette prétention ?
La pensée d'un philosophe du XIXe siècle, Friedrich Nietzsche (1844-1900), peut aider à poser ces problèmes très actuels. En 1874, dans sa deuxième Considération inactuelle, intitulée "De l'utilité et des inconvénients de l'histoire pour la vie", Nietzsche mettait en évidence les enjeux cruciaux de la "science historique" et de notre rapport au passé.
C'est en compagnie de Dorian Astor, philosophe, germaniste et spécialiste de Nietzsche, que ces questions sont traitées.

Émission "La grande H.", animée par Julien Théry.