"La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum". Cette phrase nous dit quelque chose, un souvenir jailli des limbes de notre "conscience de citoyen", pour parler comme Robespierre. Tel est l’article 3 de notre Constitution. Dont le dernier mot repose désormais dans le cimetière des idées d'antan.
Abandonné par les élites, laissé aux mains des populistes ou de leurs affidés, dévalorisé pour ses effluves nauséabonds qui renverraient aux "heures les plus sombres" de l'histoire, le référendum a disparu. Depuis le rejet de la Constitution européenne en 2005, clairement refusée par le peuple de France, finalement repêchée par le traité de Lisbonne ratifié par le Parlement, plus personne – ou presque – n'envisage de consulter les citoyens sur les sujets qui fâchent. Souveraineté, Europe, immigration, réforme des retraites, crise de l’énergie : les décisions sont prises par le gouvernement, parfois contre l'Assemblée Nationale et à coups de 49.3, ou bien par les juges, tous tributaires des décisions de la Commission de Bruxelles et des Cours européennes.
Que s'est-il passé ? Où va la démocratie française ?
Il n'y a plus de lien entre le fonctionnement institutionnel de notre pays et la volonté de sa population. Car nous sommes désormais gouvernés par des traités supranationaux. Ceux qui dirigent l'État ne sont plus que les gestionnaires d'un ordre institutionnel dont le contenu nous échappe. On nous dit que ce dépassement de l'État-nation est le moyen de chasser définitivement le spectre du totalitarisme et de la guerre.
Mais nous constatons que c'est d'abord l'État social qui se déconstruit, ainsi que le lien entre l'orientation de l'action étatique et les citoyens. De cette déconstruction ne résulte aucune pacification, ni rien de bon. Lutter efficacement contre ce dessaisissement aurait supposé que nous ayons compris les liens entre la construction de l'État souverain et la réapparition de la politique et des processus démocratiques.
C'est l'objet du travail de Gilles Amiel qui nous offre une analyse singulière des conditions de possibilité de la démocratie.
Est anachronique ce qui est contraire à la chronologie, c'est-à-dire à la raison du temps ou encore, dans le cadre de la société industrielle, à l'irrésistible marche en avant du Progrès.
Baptiste Rappin expose une série de huit contresens historiques, non pas dans la mesure où ils entretiendraient maladroitement une certaine confusion des époques, mais parce qu'ils explorent volontairement des directions contraires à l'esprit du temps.
Au bon sens communément admis, ils opposent des interprétations, des explicitations et des déchiffrages qui, invariablement, recherchent une forme de désajustement du contemporain. Ce faisant, ils favorisent l'avènement d'une pensée de l'intempestivité.
Émission "Le monde de la philosophie", animée par Rémi Soulié.
À l’écart du brouhaha médiatique et des idéologies à la mode, Pierre Legendre trace patiemment, depuis plus de soixante ans, le chemin de l'anthropologie dogmatique. Il revient, en la maison qui l'a accueilli dans ses premières années d'étude des manuscrits médiévaux, l'École des Chartes, pour livrer "à la jeunesse désireuse des lois" le suc de son labeur.
Dans le droit fil de De la Société comme texte (2001) et en résonance avec ses conférences données au Japon en 2004 Ce que l'Occident ne voit pas de l'Occident, dans un style dépouillé, Pierre Legendre révèle ce qui fait tenir debout, enlacés, l'humain et la société.
Et quel meilleur guide que Piero della Francesca pour ouvrir nos yeux à l'invisible ?
Arnold Gehlen, né le 29 janvier 1904 à Leipzig et décédé le 30 janvier 1976 à Hambourg, est un philosophe, sociologue et anthropologue allemand.
Fondateur de l'anthropologie philosophique, sa réflexion porte sur l'homme en tant qu' "animal inachevé" (Nietzsche) mais "ouvert au monde".
Considéré comme le principal représentant de la pensée conservatrice en Allemagne après 1945, ainsi que comme l'un des intellectuels conservateurs les plus importants du XXe siècle, son œuvre commence seulement à être traduite en français.
Benjamin Demeslay se propose de nous y introduire.
Émission "Le monde de la philosophie", animée par Rémi Soulié.
Juriste à l'œuvre aussi abondante et complexe qu'originale, Pierre Legendre n'a pas encore fait l'objet d'études synthétiques qui puissent donner un accès simplifié à son oeuvre.
C'est ainsi tout l'enjeu de cette conférence que de présenter les contours d'une pensée riche qui ne considère pas le droit sous des aspects techniques, mais en vertu de sa portée anthropologique issue de la réforme grégorienne.
Baptiste Rappin alors de présenter les principaux concepts de l'anthropologie dogmatique en gardant à l'esprit que le coeur de la pensée de Pierre Legendre s'articule toujours autour de la question de la généalogie et de la filiation.
Arnold Gehlen (1904-1976) est un anthropologue, sociologue et philosophe allemand dont l'influence sur la pensée conservatrice européenne a été considérable et dont les analyses furent à certains égards prophétiques.
Refusant de réduire l'homme à une dimension unique, qu'elle soit spirituelle ou biologique, il voit en lui un être d'ouverture en raison de son immaturité natale. Dans cette perspective, les institutions – dont la famille – ne sont en rien oppressives mais, au contraire, libératrices, en tant qu'elles lui permettent de mener une vie proprement humaine. En ceci, Gehlen s'oppose à Adorno, à l'École de Francfort, aux idéologies progressistes et révolutionnaires.
En outre, il fut un critique virulent et inspiré de l'hypermorale qui, aujourd'hui, tient lieu de politique et accroît la confusion.
Émission "Les idées à l'endroit", animée par Rémi Soulié.
Est-il possible de faire de l'entreprise l'un des cadres de la démocratie économique ? Jusqu'à quel point les entreprises transnationales peuvent-elles exercer un pouvoir normatif susceptible de concurrencer celui des états ?
Alain Supiot analyse les conditions de la démocratisation de l'entreprise en cherchant d'abord à saisir juridiquement la notion d'entreprise, en analysant les difficultés de sa définition, en retraçant sa généalogie institutionnelle et en revisitant les théories dont elle a fait l'objet en droit social, pour ensuite traiter des conditions d'une démocratisation de l'entreprise, en analysant la tension normative dont elle est aujourd'hui l'objet et la dynamique de son autoréglementation.