Pendant longtemps, les humains étaient persuadés que la Terre était plate. Depuis quand a-t-on dépassé ce préjugé, qui apparaissait comme du "bon sens", pour prouver que la Terre était ronde comme une orange ?
Disons-le tout de suite, c'est un lieu commun et même un mythe, que de penser que le Moyen Âge a cru que la Terre était plate.
Cette idée est non seulement historiquement fausse, mais relève même d'une manipulation de l'histoire des sciences, et surtout des consciences. De l'Antiquité grecque à la Renaissance européenne, on n'a pratiquement jamais défendu et encore moins enseigné, en Occident, que la Terre était plate. Pour Platon, par exemple, la Terre est "enroulée autour de l'axe qui traverse le tout", affirme-t-il dans Le Timée. Chez Aristote également, les arguments qui démontrent la sphéricité de la Terre sont bien présent, et se situent dans son traité Du ciel. Par conséquent, si philosophes comme géographes de l'Antiquité, tels qu'Anaximandre de Milet ou Strabon, ont découvert que la terre était ronde, comment passe-t-on à la conception de la Terre plate au Moyen Âge ? Est-ce une question de croyances religieuses et d'ignorance en matière scientifique ?
Bien que c'est au XIXe siècle que s'est ancrée le préjugé selon lequel le Moyen Âge croyait la Terre plate, cette légende est plus ancienne puisqu'elle apparaît dès les XVIIe et XVIIIe siècles. Les raisons qui expliquent le succès de la légende de la Terre plate sont multiples et parfois même souterraines. Parmi ces raisons, on compte la lutte contre le cléricalisme de la part de la jeune République, qui tend à se démarquer ainsi de l'obscurantisme de l'Eglise au Moyen Âge. Il y a aussi la glorification de l'idée de Renaissance, qui a du coup désigné le Moyen Âge comme le temps de la barbarie, des "Goths", comme dirait Rabelais. Il y a enfin l'historiographie qui cultivait le goût des grands hommes et des grands récits plutôt que de la vérité des sources…
Émission "Sans oser le demander", animée par Matthieu Garrigou-Lagrange.
La technique semble désormais empiéter sur tous les domaines de l'activité humaine. La science se transforme en technoscience. La morale se fait gestion des ressources et management. La parole est livrée aux techniques de communication ; l'amour, au Kâma-Sûtra. Il n’est pas même jusqu'à l'évangélisation qui ne soit atteinte : on la conçoit aisément comme la nécessité d'allier Facebook à la Sainte Face, et Twitter à l'Esprit Saint. Il ne s'agit plus d'être, mais de faire (l'amour ou un beau discours). Mais un faire qui ne se fonde plus sur l'être ne peut en vérité que défaire, et sa volonté de puissance cache une impuissance radicale, qui asservit au lieu d'élever, qui manipule au lieu d'engendrer.
L'enjeu du cours de Fabrice Hadjadj est donc, avec Aristote et saint Thomas, de distinguer la technè (faire), de la praxis (agir) et de l'epistèmè (savoir), pour montrer en quoi le savoir-faire n'est pas d'abord un savoir, et en quoi la perfection de l'art ne se situe pas sur la même ligne que la perfection morale : la confusion, aussi bien que la séparation de ces trois espèces de vertu, est désastreuse.
Il montre également comment s'est opéré le passage de la technè des Anciens à la technique des Modernes, pour essayer de penser l'empire technocratique de notre époque (qui ne semble d'ailleurs plus une époque, mais un délai).
Ce sont bien les écrans qui font écran, en dépit de leurs nombreuses "fenêtres" et "icônes", et nos GPS qui nous égarent systématiquement, quand il s'agit d'être simplement ici...
Le mathématicien et philosophe Olivier Rey réalise une synthèse très éclairante sur le développement de la pensée moderne et de son appréhension de la nature marquée par la mathématisation. Il montre comment le vivant, dans ses formes souvent étonnantes et merveilleuses (comme celle du Paon qui fait la roue), échappe à cette approche réductionniste ainsi qu'à la logique de la pure conservation.
David Cosandey, docteur en physique théorique, est un essayiste suisse. Il est notamment l'auteur du Secret de l'Occident, un ouvrage qui étudie l'essor de la civilisation occidentale dans l'histoire des sciences. Il est par ailleurs chargé de la modélisation mathématique dans un établissement bancaire.
- 0'00'00 : Docteur en physique théorique et essayiste
- 0'03'28 : Eurocentrisme ?
- 0'04'38 : Le point de vue marxiste
- 0'06'00 : Une civilisation, c'est quoi ?
- 0'08'00 : La civilisation européenne
- 0'08'58 : Le rôle des universités
- 0'11'12 : Essor économique et progrès scientifique
- 0'13'57 : Homo Economicus
- 0'15'58 : Liberté académique et concurrence entre États
- 0'20'45 : Le rôle de la Guerre
- 0'27'12 : L'Inde et l'Islam
- 0'30'27 : Transferts entre civilisations
- 0'31'23 : L'Égypte pharaonique et Summer
- 0'35'07 : La colonisation européenne
- 0'38'39 : L'hypothèse thalassographique
- 0'44'59 : La situation de la Russie (vs l'Angleterre)
- 0'48'56 : La Guerre froide
- 0'50'38 : Un monde multipolaire ?
- 0'52'31 : La Chine, une puissance d'avenir ?
- 0'58'46 : L'Union européenne et le progrès techno-scientifique
- 1'02'03 : Le déclin de l'Occident
- 1'04'46 : L'internet et le web
- 1'08'46 : La planetographie
- 1'11'55 : Écologie et limites de la civilisation techno-scientifique?
- 1'15'45 : Carte blanche - réception du Secret de l'Occident
Alors que sommes embarqués dans la grande accélération, qui menace aujourd'hui l'existence de la population humaine globale, Pablo Jensen tente un parallèle entre les logiques des révolutions scientifique et industrielle, qui mettent en place des circuits longs pour, respectivement, expliquer ou métaboliser le monde. La grande accélération serait alors produite par la synergie entre sciences expérimentales et industrie, menant à la création de boucles de rétroaction positive stables permettant d'aspirer et contrôler le monde.
Dans un premier temps, c'est la logique des premières étapes de la révolution scientifique qui est analysée en les reliant à celles de la révolution industrielle, grâce notamment à l'idée de "Engine Science" (Caroll-Burke, 2001).
Ensuite, et de manière plus générale, on se demande ce qu'on gagne et ce qu'on perd lorsqu'on passe d'un circuit court à un circuit long : quand on fait un détour par un laboratoire ou un centre de calcul pour maîtriser un phénomène ou quand on bâtit une usine de production de masse au lieu d'engendrer ses ressources localement.
Finalement, la conclusion est consacrée à l'exploration de ce parallèle entre sciences et machines en s'interrogeant sur la nécessité de refonder les sciences expérimentales pour les rendre "Terrestres".
Comment l'idéal moderne de liberté défini comme l'affranchissement de la tradition pour mener sa vie propre et pour être soi-même a-t-il pu déchoir en liberté de choisir le lieu de ses prochaines vacances ? Les questions de fond - la vie telle qu'on aimerait vraiment la vivre, le sens d'une existence humaine - disparaissent de l'horizon.
Comment en sommes-nous arrivés à cette insignifiance ? Comment avons-nous pu à ce point nous fourvoyer ? La chose paraît si incompréhensible qu'elle nous invite à parcourir à nouveau le chemin, comme lorsqu'on a perdu ses clés et qu'on repasse dans sa tête faits et gestes pour se souvenir où on les a posées. Alors on se heurte à ce fait massif : la science moderne a peu à peu capté l'essentiel des forces spirituelles et matérielles de la culture occidentale.
Mais pourquoi l'Europe s'est-elle lancée à corps perdu dans l'aventure scientifique, du temps où la science ne servait pratiquement à rien ? Pour quelle raison, aujourd'hui, certains biologistes tiennent si fort à ce que l'homme soit une simple machine à survie pour ses gènes, ou une machine neuronale ? Quels sont les rapports ambigus entre l'individu autonome, libre, et la pensée objectivante qui nie son autonomie et sa liberté ? Que demande-t-on ultimement à la science ?
Émission "Planète Féministe", animée par Marie-Anne Juricic.
Sans débat, pas de démocratie, répète-t-on à l’envi. C'est encore plus vrai dans le monde des idées. La philosophie crève de ne plus débattre, sinon en vase clos. Tout le contraire de Renaud Camus et d’Olivier Rey. Quand l'auteur de La Dépossession rencontre celui d'Une question de taille, cela donne une rencontre au sommet.
Une rencontre qui se veut le début d'une réponse écologique à la fois radicale et enracinée à opposer à la technique sans âme et au marché sans loi qui nous dépossèdent du monde que nous aimons.
Un échange modéré par François Bousquet.
Entre le XIIIe et le XVe siècle, la péninsule italienne est l'un des principaux foyers intellectuel et économique européens. Organisée tout d'abord autour des communes, la vie politique suscite la naissance d'États régionaux. Les deux forces antagonistes, Empire germanique et papauté, qui avaient jusque-là dominé, renoncent à assurer leur prépondérance.
De 1454 à 1494, une "politique d'équilibre" groupe les souverains dans une Ligue italienne qui, dans le climat culturel et artistique prestigieux du Quattrocento, semble préfigurer la formation d'un État national, sur le modèle espagnol ou français. Mais une série d'interventions étrangères vont bloquer cette évolution.
C'est dans ce contexte que certains esprits vont alorsa produire des oeuvres qui joueront un rôle décisif pour l'avenir du continent : Machiavel, Giordano Bruno ou encore Galilée.