C'est à partir de recherches bien établies que Justien Curieux nous invite à explorer les relations complexes et souvent méconnues entre une certaine élite américaine et l'Allemagne dès la période d'entre-deux-guerres.
Des liens évidemment économiques, mais aussi politiques et, peut-être plus troublant, également idéologiques, doivent être mis en lumière pour comprendre les enjeux de cette période trouble de l'histoire qui verra Adolf Hitler arriver au pouvoir.
Journaliste, essayiste, romancier et historien, Emmanuel Berl connut une forte notoriété dans le cours du dernier siècle, à la croisée de la vie intellectuelle, de la création littéraire et de tous les remous de la politique. Cette émission s'emploie à restituer sa portée contemporaine à un auteur qui compta en son époque et que l'oubli risque d'éloigner de notre attention et de notre intérêt.
Journaliste, il fut écouté, commenté, discuté. Romancier, il restitua les sensibilités de son époque dans des livres qui rencontrèrent leur public. Historien, méfiant envers tous les académismes, il fit émerger, contre la doxa, des interrogations originales et stimulantes. Sa langue était sûre et précise, libre de toute enflure. Sa curiosité le portait sans relâche vers toutes les étrangetés de l'humanité.
Et en même temps notre regard est voué à s'enquérir des raisons qui lui firent, à la fin des années trente, et au début du régime de Vichy, prendre des positions qui peuvent, avec le recul, heurter. Son obsession de lucidité le conduisit alors dans un chemin qui nous paraît, avec le recul, en contradiction avec les aspirations et les convictions de sa jeunesse. Il se peut bien qu'Emmanuel Berl ait incarné de la sorte les effets d'un pacifisme intégral qui en aveugla bien d'autres, dans sa génération, celle des tranchées de 14-18, sur la portée et les enjeux de la Seconde Guerre mondiale.
Émission "Concordance des temps", animée par Jean-Noël Jeanneney.
Que s'est-il passé à Paris le 6 février 1934 ? Les évènements sanglants de cette soirée d'émeute ont nourri des interventions divergentes : celle, à gauche, d'un complot fasciste contre la République et la démocratie, celle à droite d'une journée fédératrice, quasi-mythique, pour la droite extra-parlementaire révoltée par l'affaire Stavisky.
Auteur d'un livre de référence sur le sujet, Olivier Dard montre que le 6 Février ne fut pas le résultat d'un complot, fasciste, jacobin ou royaliste et que les Ligues opérèrent dans le désordre sans chercher à prendre le pouvoir par la force. L'émeute fut provoquée par le limogeage du préfet Chiappe et c'est la gestion déplorable des forces de l'ordre qui fit couler le sang.
- 0'00'00 : Intro
- 0'00'59 : Situation politique après les élections de 1932
- 0'06'57 : L'affaire Stavisky
- 0'11'00 : Le lien entre la droite parlementaire et les ligues
- 0'18'02 : Les communistes, acteurs oubliés du 6 février
- 0'21'48 : Jean Chiappe, préfet de police de Paris
- 0'27'07 : Récit du 6 février 1934
- 0'34'48 : Se passe-t-il quelque chose en Province ?
- 0'36'00 : Les dirigeants des ligues ont-ils un but ?
- 0'41'00 : Quel est le role des chefs militaires ?
- 0'43'02 : Des réactions au sein de l'armée ?
- 0'45'43 : Des supposés complots
- 0'47'32 : Complot du Manoir d'Anjou, duc de Guise et comte de Paris
- 0'50'26 : La gauche, barrage contre le coup d'Etat "fasciste" ?
- 0'56'47 : Non pas UN mais DES 6 février 1934
- 0'58'11 : Effectif des manifestants
- 1'04'20 : Le 6 février vu par la presse internationale
- 1'05'54 : Quel est l'impact auprès la presse et de la population ?
- 1'09'26 : L'appareil d'Etat a-t-il bougé ?
- 1'11'48 : Quel est le point des fascistes sur le modèle italien ou allemand ?
- 1'16'43 : Désaccord de fond avec Sternhel
- 1'19'34 : Berstein détruit la pensée de Sternhel
- 1'27'31 : Action catholique belge et le nazification
- 1'29'11 : Outro
Historien spécialiste du fascisme, Frédéric Le Moal poursuit son travail d'analyse et de compréhension en dressant une série de portraits des principaux compagnons de Mussolini. Peu connus du grand public, ces hommes entourèrent et servirent le Duce avec une ferveur quasi religieuse, tels des disciples vénérant le fondateur de l'Italie nouvelle.
Ils furent les protagonistes en chemises noires des violences de l'après-guerre, les acteurs de la Marche sur Rome, les architectes de la dictature, les penseurs de l'idéologie fasciste, les maîtres d'œuvre d'une diplomatie originale. Beaucoup venaient des rangs du socialisme italien, d'autres du nationalisme. Tous communièrent dans le culte du dictateur, qui exerçait sur eux une sorte de sortilège et ne cessait de les dresser les uns contre les autres dans une sanglante émulation.
Pourtant, une majorité d'entre eux se retourna contre lui quand les désastres de la Seconde Guerre mondiale précipitèrent l'Italie dans l'abîme. Les hommes de Mussolini le trahirent, y compris son propre gendre, avec un courage que n'eurent ni les séides de Hitler ni ceux de Staline.
C'est cette histoire d'une fidélité rompue que raconte Frédéric le Moal à travers la vie de ces personnages au destin particulier.
Émission "Les mardis de la mémoire", animée par Anne Collin.
Quand la révolution bolchevique "ébranla le monde" capitaliste, les Occidentaux la boycottèrent et ruinèrent, après avoir envahi et ravagé la Russie pendant trois ans de guerre, toutes les tentatives soviétiques de reconstituer "l'alliance de revers" à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, alliance qui avait sauvé la France de l'invasion allemande en 1914.
Le sabotage fut spectaculaire entre guerre d'Espagne, Anschluss, accords de Munich, "déclarations d'amitié" anglaise et française avec le Reich et "farce de Moscou". On n’oubliera pas la "Pologne des colonels", complice ouverte du Reich depuis 1933, signataire avec lui de la "déclaration de non-agression et d'amitié" du 26 janvier 1934.
Une mise au point nécessaire alors que le Parlement européen décrète que nazisme=communisme et qu'on nous certifie que le pacte de non-agression germano-soviétique du 23 août 1939 fut une cause majeure, voire la cause, de la seconde conflagration mondiale.
Face à la prise de pouvoir des Bolchéviks en Russie, les exilés en Europe ont tenté de s'organiser pour renverser le pouvoir rouge. Gagnant le surnom de "Russes blancs" ils ont manœuvré tout au long des années 1930. Certains se sont engagés durant la Seconde Guerre mondiale pour essayer de renverser Staline, en vain.
Retour sur l’épopée de ces Russes blancs avec Sylvain Roussillon.
Une émission présentée par Jean-Baptiste Noé.
Les sorties de guerre font aujourd'hui l’objet de réflexions fécondes, notamment en France. Dans la cas de la Première Guerre mondiale, afin d'appréhender le phénomène historique dans toute sa complexité et dans une perspective résolument européenne, une approche globale s'imposait.
Les limites chronologiques - janvier 1918 à la fin de l'année 1925 – permettent, elles, de montrer les scansions fondamentales qui rythment ce laps de temps où les peuples croient en finir avec la guerre, quand celle-ci se prolonge et se transforme.
L'année 1918 doit être étudiée pour elle-même : en un an, les visages de la guerre évoluent par le retour de la guerre de mouvement. L'année 1919 est déterminante, alors que les démobilisations militaires se font et que les sociétés commencent à revivre. Les années 1920 à 1925 voient enfin les prémices du fascisme italien, du nazisme allemand et l'extension de la révolution bolchevique, tandis que le démantèlement des empires centraux se poursuit par de nombreuses guerres civiles.
La sortie de guerre se fait donc singulièrement attendre dans de nombreux secteurs de l'Europe traumatisée par la Grande Guerre.
Après la chute de la France, en juin 1940, l'Angleterre a bien failli faire la paix avec le IIIe Reich et accepter le partage du monde qu'Hitler lui proposait depuis son arrivée au pouvoir. Nul doute qu'alors l'issue de la guerre eût été tout autre.
En parvenant, sur le fil, à faire échouer ce plan, Churchill n'a pas seulement triomphé des anciens partisans de l' "apaisement", regroupés derrière son prédécesseur Neville Chamberlain, l'homme des accords de Munich. Les forces qu'il a vaincues in extremis s'activaient depuis deux décennies, tantôt dans l'ombre, tantôt au grand jour, pour répudier l'ancienne "Entente cordiale" entre Londres et Paris au profit d'un accord géopolitique global avec l'Allemagne : à cette dernière, la direction politique du continent, assortie d'une intégration économique et financière poussée avec le monde anglo-saxon ; à l'Empire britannique, un leadership écrasant sur le commerce mondial.
Ce rêve n'a pas seulement été poursuivi par de nombreuses figures de l'aristocratie britannique, sans parler d'une partie de la famille régnante, fidèle à ses origines allemandes - à commencer par le roi Édouard VIII, authentiquement nazi. Largement partagé, il avait pour chef de file le gouverneur de la Banque d'Angleterre en personne, Montagu Norman, et ses adeptes se recrutaient dans tous les secteurs de l'opinion, syndicats compris.
Quant à Hitler lui-même, c'est peu dire que sa fascination pour l'Angleterre était inséparable de sa doctrine raciste. Cette dernière fut forgée au contact d'un idéologue britannique, Houston Stewart Chamberlain, considéré par les nazis comme leur second "prophète".
L'historien Eric Branca nous raconte l'histoire inédite et prenante de ces liaisons dangereuses qui faillirent changer la face du monde et perdurèrent jusqu'à la chute du IIIe Reich.