Allen Ginsberg, l'incantation du souffle. Avec Jean-Jacques Lebel, Yves Le Pellec, Alain Dister, Brice Matthieusant, Christian Bourgois, Hawe Silverblat et Bob Rosenthal sur France Culture.


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11.06.1998

Mort en 1997, celui qui est sans doute le plus grand poète de ce que l'on appela la Beat Generation, fut sans conteste le leader chamarismatique du mouvement, "la voix qui crie dans le désert". Et cependant, est-ce le sort réservé à la poésie ?
Il demeure pour le public français largement méconnu, si on le compare à Kerouac , le compagnon de route dont les romans furent traduits et lus en France dès les années 60. Pourtant, celui qui écrivit en 1955 son premier recueil de poésies Howl, qui était aussi un cri de protestation et un hymne au sacré des choses, recueil dont la lecture est encore aujourd'hui interdite à la radio publique aux USA, celui qui fut hanté toute sa vie par la folie de sa mère Naomi, qui, sous peyotl, expérimenta le "dérèglement systématique et raisonné de tous les sens", demeure la figure la plus flamboyante d'un mouvement hétérogène et passionné qui contesta durablement l'establishment américain.
Juif, homosexuel, converti au bouddhisme, il fut de tous les combats qui ébranlèrent l'Amérique des années 60, et il sut admirablement -paradoxe apparent ?- se servir des médias pour servir le poème et ce qui dans le poème, dans la grande tradition des vaticineurs anglo-saxons, de Blake à Whitman, en demeure le coeur inviolable et sacré : le verbe. Ginsberg croyait en la puissance du verbe, au langage du souffle -ses lectures publiques des heures durant sont demeurées célèbres-, à la vision créatrice de la poésie.
Grand voyageur, de New York à Paris, en passant par San Francisco, grand amateur de jazz et explorateur des espaces du dedans, Ginsberg demeure une "figure" incontournable des sixties. Il faut réentendre sa voix.

Émission "Une vie, une oeuvre", produite par Michel Cazenave.

Ezra Pound, violemment americain. Avec Hubert Lucot, Jacques Henric, Jacqueline de Roux, Michel Morht, Yves di Manno et Richard Sieburth sur France Culture.


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05.11.1992

Comme Louis-Ferdinand Céline, Erza Pound a connu la gloire et l'opprobre. Sa vie et son œuvre posent à l'esprit humain une question insoluble, une insupportable énigme : comment peut-on être en même temps écrivain de génie - le plus grand poète américain du siècle - et chantre de l'idéologie fasciste, ennemi irréductible de la démocratie ?
Au départ, il sollicite le dépaysement ; enfant du vieil Ouest, il laisse derrière lui l'Amérique, quitte en 1907 la morne société victorienne pour l'Europe où il décide de vivre. Londres, Paris, Venise...
Traducteur, poète, critique, Erza Pound est capable d'avoir une idée par seconde et fonde une demi douzaine de mouvements littéraires. Compositeur, éditeur, plus généreux que marmoréen, il "épaule" James Joyce dans la recherche, dans la continuation d' "Ulysse"... Point d'effusions diffuses ou d'épanchements, le poète n'écrit pas en son nom puisque sa création englobe tout l'héritage culturel.
Ezra Pound entreprend les Cantos, un "livre des morts" ou une "descente aux Enfers", qui établit un dialogue avec les textes célèbres de la culture Européenne puis chinoise ... Et visite les traductions inconnues et convoque les maîtres relégués dans l'ombre, oubliés ou négligés.
Défenseur érudit de la tradition artistique et promoteur de formes nouvelles, Ezra Pound procède par conversation fragmentaire, fusion de personnages, montage de citations, d'événements spirituels et de faits divers de l'époque, compression de l'Histoire...
Contempleur acharné de l'usure et de la décadence des Etats-Unis, il se livre pendant la Seconde guerre mondiale à des causeries véhémentes et violemment anti-américaines, à la radio romaine, et en faveur de Mussolini, se prononce contre l'intervention US traître à l'Amérique. Dès que les Américains débarquent, il est enfermé par les forces militaires dans une cage de fer, ramené et interné à Washington.
L'homme déchu est primé et célébré en 1948, "grand poète américain", les Cantos sont salués comme "la grande épopée de notre temps et de l'homme moderne".
Au terme de sa vie, Ezra Pound se plaît à dire qu'il a été le dernier Américain a avoir vécu la tragédie de l'Europe ou encore "une fourmi qui aurait échappé au naufrage de l'Europe".

Émission "Une Vie, une Œuvre", produite par Pascale Charpentier.

Le délire occidental et ses effets actuels dans la vie quotidienne. Avec Dany-Robert Dufour à la Librairie Quilombo.


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18.02.2015

Et si la raison occidentale était devenue délirante ? Si tel était le cas, alors il faudrait entreprendre séance tenante une "psychanalyse" de ce délire occidental.
Dany-Robert Dufour s'en donne les moyens. Il part de ce que Descartes proposait dans Le discours de la méthode, fondement de la raison moderne : que les hommes "se rendent comme maîtres et possesseurs de la nature". Un tournant dans l'aventure humaine qui a entraîné le développement progressif du machinisme et du productivisme, jusqu'à l'inflation technologique actuelle affirmée comme valeur suprême.
Si ce délire occidental fait aujourd'hui problème, c'est qu'il a gagné le monde (la mondialisation néolibérale qui exploite tout, hommes et environnement, à outrance) et qu'il est appelé, comme tout délire, à se fracasser contre le réel. D'une part, parce que la toute-puissance et l'illimitation des prétentions humaines qu'il contient ne peuvent que rencontrer l'obstacle : notre terre réagit déjà vigoureusement aux différents saccages en cours. D'autre part, parce que ce délire altère considérablement les trois sphères fondamentales de la vie humaine que sont le travail, le loisir et l'amour en les vidant de tout sens.
Mais tout n'est pas perdu : c'est à une nouvelle raison délivrée de ce délire que Dany-Robert Dufour en appelle pour une refondation de la civilisation occidentale, dont il esquisse les possibles contours.

Otto Weininger et la question du génie. Avec Jacques-Antoine Malarewicz chez Etienne Klein sur France Culture.


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18.02.2017

Le 3 octobre 1903, un tout jeune philosophe, Otto Weininger, se suicida à Vienne d’une balle en plein cœur, dans une chambre qu’il avait louée dans l’immeuble où Beethoven était mort trois quart de siècle plus tôt. Il n’avait que 23 ans. Il venait tout juste de faire paraître un ouvrage étrange, inclassable, provocateur et même scandaleux, intitulé Geschlecht und Charakter, autrement dit, Sexe et Caractère.
Il y parlait de presque tout, du génie, de la "génialité", de la musique, du sentiment de décadence, de la haine de soi, de la sexualité de l’homme et surtout de celle de la femme. Ce livre marqua les plus grands esprits et ne laissa presque personne indifférent. Il connut de très nombreuses rééditions – trente-six jusqu’en 1925 – et également de très nombreuses traductions. Il faut dire qu’à côté des outrances, des contradictions, des aphorismes bizarres et des théories bancales qui y foisonnent, il est parsemé de constats sur la société moderne qui continuent de nous percuter.
Sigmund Freud considérait qu’Otto Weininger était un pur génie, Ludwig Wittgenstein le tenait en grande estime, tout comme Karl Kraus, Stefan Zweig, Robert Musil, James Joyce, Franz Kafka, Georges Bataille ou encore Emil Cioran. Mais d’autres considérèrent que ce chaman de l’intelligence n’avait été qu’un enragé victime de ses problèmes, un aliéné, un individu possédé par des forces qui le débordent.
D’où la question : qu’est-ce que le génie ? Quel lien a-t-il (ou n’a-t-il pas) avec la folie ? Ceux qui pensent ce que les autres ne pensent pas, ou qui voient au-delà des réalités empiriques, seraient-ils condamnés à éprouver l’angoisse d’un exilé chez les araignées, la pulsion irrépressible de plier bagage, un désir fou d’errance définitive ?

Emission "La Conversation scientifique", animée par Etienne Klein.

Entre crise et guerre : philosopher ? Avec Dominique Pagani à la Commune libre d'Aligre à Paris.


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2015

Plutôt qu’une reconstitution linéaire de l’histoire de la philosophie, l’intervention portera surtout sur ce qui, à la faveur de la crise en cours, fait surgir la spécificité de l’interrogation philosophique en général, via ses concepts les plus récurrents.
La référence aux auteurs servira à illustrer les problématiques ainsi dégagées, autant que leurs effets transversaux dans les champs concernés : du poétique au politique, en passant par le religieux ou le scientifique.

Serions-nous en train de perdre la raison ? Avec Bernard Stiegler chez Etienne Klein sur France Culture.


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25.06.2016

Si on fait un tour dans une librairie pour lire les quatrièmes de couverture des livres qui s’y trouvent, on ne tarde pas à reconnaître l’air du temps : ce n’est pas la joie dans les rayons. Les réflexions sur la catastrophe sont devenues un genre littéraire à part entière. L’actualité y aide en pourvoyant au renouvellement des exemples. Le monde ne nous lâche plus. Il déferle en funestes accélérations qui défient toute maîtrise. Chaque jour, le présent projette ses terreurs sur l’avenir, et remet ainsi une couche supplémentaire de noir sur l’obscurité générale. On dirait du Soulages, en continu et à tous les étages.
Mais on voit quand même resurgir çà et là l’hypothèse – ou la conviction – qu’un salut est possible. Preuve que les temps mauvais donnent du bon temps à la fois aux Apocalypses et aux Annonciations, même si c’est en proportions inégales. Et c’est ainsi que nous nous retrouvons ballottés entre discours pessimistes et discours optimistes, tous débités sur un ton d’oracle, alors même qu’ils ne sont peut-être que des états d’âme.
Devons-nous conclure que nous ne serions plus capables d'espérer ? Convenons de définir l'espérance comme "ce sentiment humain qui règle notre relation avec l'avenir". Les sombres perspectives écologiques, les limites de la croissance, la crainte du chômage, l'accroissement des inégalités ou encore la crise des solidarités illustrent notre sentiment de malaise face à l'avenir. Elles traduisent également la mauvaise relation que nous entretenons avec un futur appréhendé non plus comme le lieu d'une configuration possible, mais comme une réalité qui pose des problèmes de plus en plus difficiles à résorber.
La question qui se pose est la suivante : quelle est la part et le rôle de la technique dans la fabrication de cette situation ?

Emission "La Conversation scientifique", animée par Etienne Klein.

Accélération technologique : comment ne pas devenir fou ? Avec Bernard Stiegler à la Bambouseraie d'Anduze.


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15.07.2016

Parmi les différents axes de recherche du philosophe Bernard Stiegler, le numérique et l'automatisation mondiale du travail ont pris une part importante dans sa réflexion sur l'avenir de la société.
Dans les 20 prochaines années, des millions d'emplois salariés auront irréversiblement disparu au profit de la robotisation des tâches, qu'elles soient manuelles ou administratives. Cannibalisés par les technologies capitalistiques, médusés par l'accélération phénoménale de l'innovation technologique et la puissance totalement inédite qu'elle engendre (5 milliards de smartphones, 1 milliard de sites internet), nous nous trouvons dans l'incapacité de nous y adapter, parce que le temps des savoirs de l'homme est infiniment plus lent que le temps du numérique. C'est la disruption.
Cela fait obligation de reconsidérer à nouveaux frais la question du travail, des savoirs, de leur transmission, de l'avenir, de féconder par de nouvelles idées et de nouveaux rêves une autre réalité individuelle et collective, pour que le raz-de-marée de technologies conçues à des fins d'assujettissement ne nous entraîne pas dans la désertion de soi, l'abstention politique, la radicalisation des croyances et la violence. Dans une folie massifiée.

Une soirée organisée par la librairie La porte des mots.

Dans la disruption. Avec Bernard Stiegler sur France Culture.


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10.06.2016

Depuis le 11 Septembre, les actes de folie barbare ne cessent de se multiplier. Pourquoi ?
Pour Bernard Stiegler, c'est un symptôme de notre époque, qui réalise le rêve de la modernité. À travers la conquête du monde s'opère une désinhibition.
Alors, comment en sortir ? La réponse se trouve ici.

Émission "Les Nouveaux chemins de la connaissance", animée par Géraldine Mosna-Savoye.