Les paysans bourguignons et les Lumières : du communisme au capitalisme sauvage, avec Marion Sigaut.


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08.04.2022

Fragilisée par les guerres civiles, la société paysanne d'Ancien Régime a subi les attaques d'une bourgeoisie qui lorgne sur ses communaux et rêve de s'enrichir encore.
Ou comment la paysannerie, et plus particulièrement la paysannerie bourguignonne à la lumière des travaux de PIerre de Saint-Jacob, sous les coups de boutoir des "philosophes des Lumières", a perdu 80% de son pouvoir d'achat en un demi-siècle !

Raisonner sur le blé, essais sur les lumières économiques. Avec Steven Kaplan sur France Culture.


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15.09.2017

"Vers l'an 1750 la nation rassasiée de vers se mit enfin à raisonner sur les blés." Cette célèbre formule de Voltaire capte bien ce que Steven Kaplan appelle le tournant économique des Lumières, qui ne se manifeste pas seulement dans les modes de production mais dans les modes de représentation. Les blés sont ici une métaphore puissante des questions de politiques et de théories que l'on appelle de plus en plus "économie politique".
Le problème des blés, comme source de richesse et de subsistance, soulève les questions fondamentales concernant l'origine de la société, la gouvernance, les relations entre État et société, la nature de la royauté, le vivre-ensemble, les droits des uns et des autres, la place de l'individu vis-à-vis des structures corporatives, l'antagonisme et/ou l'articulation de l'économie de marché et de l'économie morale, qui ne sont pas sans faire écho à notre temps.

Émission "La Fabrique de l'Histoire", animée par Emmanuel Laurentin.

Comprendre les Lumières. Avec Marion Sigaut et Alain Soral à Nantes.


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16.02.2013

Lors de son intervention, l’historienne Marion Sigaut démontre comment Louis XV, sous l’influence entre autres de sa maîtresse la marquise de Pompadour, va favoriser le développement de la philosophie des Lumières dans le royaume de France et adopter certaines de leurs idées, ruinant ainsi les fondements de la monarchie et perdant l’attachement du peuple.
Pour elle, la période cruciale est celle du traité de Paris de 1763, qui consacra la défaite extérieure de la France à l’issue de la guerre de Sept Ans contre la coalition conduite par les Anglais. Cela se traduisit par la perte du premier empire français dont le Canada, la Louisiane, les îles du sucre, les Indes. Le royaume était lourdement endetté et, donc, sous la coupe des prêteurs. Mais, dans le même temps, la France était en train de subir une défaite intérieure du fait du monopole des idées pour les philosophes des Lumières qui, en 1762, ont obtenu l’expulsion du royaume des Jésuites, leurs principaux opposants intellectuels.
Prenant l’exemple du commerce des grains, elle démontre comment le docteur Quesnay, fondateur de la doctrine physiocrate, soutenu par Mme de Pompadour, va obtenir l’inversion totale des règles régissant leur distribution. Le docteur Quesnay est l’auteur des articles "Fermier" et "Grain" de l’Encyclopédie qui, sous la direction de Diderot, prétend faire l’état exhaustif des connaissances de cette époque. Cet ouvrage est au cœur du mouvement des Lumières. Il prétend remplacer la superstition par la science et préconise, pour régler tous les problèmes du royaume, de libéraliser le commerce et la société.
C’est ainsi que l’esprit qui commandait la distribution des grains dans toute la France va être détruit. En effet, conformément aux divers règlements traditionnels en vigueur dont le "traité de police" de 1709, les grains sont considérés non comme un produit ordinaire mais comme une subsistance indispensable au peuple. Le roi doit en assurer la distribution dans toute la France au "juste prix" fixé par la "taxation". Il s’agit d’un véritable service public, très contrôlé par la police dont c’est la mission première. Les intervenants, du fermier producteur en passant par le meunier et le commerçant en grains, doivent en respecter les dispositions. Or les physiocrates et les philosophes des Lumières considèrent que cette réglementation est la source des problèmes. Ils préconisent donc la libéralisation intégrale en confiant la distribution à des négociants, dont Voltaire fait l’éloge. Cette thèse est développée par un certain Herbert en 1753 dans son "Essai sur la police des grains" qui dénonce le monopole comme un préjugé.
Louis XV finira par céder et, par son décret de mai 1763, il instituera le marché national du grain qui supprime les péages et contrôles ainsi que la fixation du juste prix. Cette liberté du commerce des grains est étendue à toute l’Europe par un décret de juillet 1764. À partir de là, la spéculation sur le grain va exploser. En cinq ans, le prix du grain à Paris va doubler. En 1768, il faut 24 sous à une famille pour acheter ce qui lui est nécessaire pour se nourrir, alors que son revenu n’est que de 15 sous.
Dans tout le royaume, les émeutes vont se multiplier. Le peuple, souvent soutenu par la police, va se révolter contre ces hausses. Mais il faudra attendre 1770 pour que le roi revienne à la police des grains contre l’avis des tenants des Lumières, en particulier Turgot et Condorcet. Ceux-ci considèrent que le peuple, gorgé de préjugés, doit être converti au "progrès", qu’il doit savoir que ces lois de libéralisation sont perpétuelles et irrévocables.
Mais pour le roi, le mal est fait. Dans l’ancien système, le peuple l’accusait d’avoir été imprévoyant lors des disettes nées des mauvaises récoltes. Maintenant, il est considéré comme un spéculateur malveillant "qui s’enrichit sur le dos du peuple pour payer les frasques de ses maîtresses et de la cour". Après les scandales du trafic des enfants abandonnés, avant la suppression de la protection des travailleurs par les corporations, c’est une étape décisive vers la Révolution.
Alain Soral conclura en soulignant le parfum d’actualité de cette situation. L’adhésion du roi au libéralisme bourgeois évoque celle de l’oligarchie actuelle devenue libérale-libertaire. La suffisance et le mépris manifestés à l’égard du peuple par Voltaire et les philosophes se retrouvent aujourd’hui chez les "intellectuels" contemporains comme Bernard-Henri Lévy ou Jacques Attali. Cette Europe des Lumières annonce étrangement celle de Bruxelles, qui s’enferme dans ses dogmes malgré l’échec patent de sa politique passée.

L'économiste, la cour et la patrie. Avec Arnault Skornicki sur Fréquence Protestante.


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31.03.2012

La science économique est devenue la forme dominante du discours politique. Elle se présente pourtant volontiers comme le plus neutre et impartial des savoirs. Que signifie cette dénégation du politique de la part d’une science si intimement liée au champ du pouvoir ?
Arnault Skornicki propose un détour historique par la France des Lumières pour mettre au jour l’impensé de ce qui n’était pas encore une discipline universitaire, mais un simple genre intellectuel.
De la naissance du libéralisme d’État au Dialogue sur le commerce des blés de Galiani, de la science du commerce aux luttes entre Turgot et Necker en passant par la Physiocratie, le XVIIIe siècle apparaît en effet comme une période clé pour l’économie politique. Savants, hommes de lettres, philosophes et administrateurs mettent leur intelligence au service des Lumières qui s’officialisent et d’un État éclairé qui tente de se réformer. L’économie politique finira par accéder aux sommets du pouvoir, pour ne plus jamais les quitter.
Un travail intéressant pour comprendre la naissance du libéralisme.