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Que reste-t-il de la querelle scolaire et du vieux clivage entre "pédagogues" et "républicains" ? Partis de convictions très divergentes, Denis Kambouchner et Philippe Meirieu font aujourd'hui, avec Bernard Stiegler, le constat que les termes dans lesquels se posa cette querelle ont perdu de leur acuité dans le contexte de la vaste mutation engendrée par les nouvelles technologies.
Ces nouvelles technologies créent les conditions d'une démocratisation inespérée de l'accès au savoir ; mais en même temps, associées à un consumérisme effréné et à un marketing intrusif, elles apparaissent comme les vecteurs d'un système toujours plus perfectionné de captation des esprits.
Une telle évolution met à mal les équilibres fondamentaux de l'éducation scolaire. Surtout, l'école n'est pas armée pour penser cette mutation : ni pour remédier à ses effets les plus perturbants, ni pour s'assurer la maîtrise et l'usage effectif des potentialités qui lui sont liées. Il y a urgence.
Plus que jamais les esprits ont besoin d’une solide formation du jugement, de méthodes et de repères que seule l’école peut, à l’échelle d’une société, enseigner.


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Dans cet entretien-fleuve, le philosophe Eric Sadin, auteur des ouvrages La Silicolonisation du monde (Editions L'échappée, 2016) et L'intelligence artificielle ou l'enjeu du siècle (2018) analyse les changements économiques et sociaux liés à l'intelligence artificielle, offrant une lecture volontairement provocante qui n'épargne pas les thuriféraires des dernières avancées technologiques.


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Des ravages la data economy jusqu’au dernier rapport du GIEC, tous les signaux montrent que l’humanité s’est mise elle-même en grand danger.
Le philosophe Bernard Stiegler, fondateur du groupe Ars Industrialis et directeur de l’Institut de recherche et d’innovation du centre Georges-Pompidou, est l'auteur d’une œuvre profondément originale qui tente de penser l'anthropocène comme question philosophique en étudiant les mutations sociales, politiques et psychologiques provoquées par la "révolution numérique".
Alors qu'il publie deux livres, Qu’appelle-t-on panser ? (LLL) et La technique et le temps (Fayard), réédition augmentée de sa thèse, il revient dans cet entretien sur les enjeux d'un problème qui, fondamentalement, pose la question de la survie de l'humanité en tant qu'espèce.
Émission "Entretien Libre", animée par Aude Lancelin.


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Berceau des technologies numériques (Google, Apple, Facebook, Uber, Netflix, etc.), la Silicon Valley incarne l'insolente réussite industrielle de notre époque. Cette terre des chercheurs d'or, devenue après-guerre le coeur du développement de l'appareil militaire et de l'informatique, est aujourd'hui le lieu d'une frénésie innovatrice qui entend redéfinir de part en part nos existences à des fins privées, tout en déclarant oeuvrer au bien de l'humanité.
Mais la Silicon Valley ne renvoie plus seulement à un territoire, c'est aussi et avant tout un esprit, en passe de coloniser le monde. Une colonisation d'un nouveau genre, portée par de nombreux missionnaires (industriels, universités, think tanks...), et par une classe politique qui encourage l'édification de valleys sur les cinq continents, sous la forme d'écosystèmes numériques et d'incubateurs de start-up.
Eric Sadin nous montre comment un capitalisme d'un nouveau type est en train de s'instituer, un technolibéralisme qui, via les objets connectés et l'intelligence artificielle, entend tirer profit du moindre de nos gestes, inaugurant l'ère d'une "industrie de la vie".
Au-delà d'un modèle économique, c'est un modèle civilisationnel qui s'instaure, fondé sur l'organisation algorithmique de la société, entraînant le dessaisissement de notre pouvoir de décision. C'est pour cela qu'il est urgent d'opposer à ce mouvement prétendument inexorable d'autres modalités d existence, pleinement soucieuses du respect de l'intégrité et de la dignité humaines.
Une conférence qui se tient à l'Institut français de Madrid, animée par Marta Peirano (les questions sont posées en espagnol).


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Avec l'Intelligence Artificielle, l'Homme s’est pris à rêver, du meilleur comme du pire. Entre les partisans d'un avenir radieux où l'Homme sera quasi immortel et où les ordinateurs seront drôles, sexy et aimants (Laurent Alexandre, Ray Kurzweil), et ceux qui versent plutôt dans les lendemains qui déchantent – Elon Munsk, Stephen Hawking, pour ne citer qu’eux – le consensus est loin d’être atteint.
Mais l'IA n’est pas qu'un objet de débats politiques et éthiques. C’est aussi un sujet central pour les entreprises, et les start-ups s'y sont mises en masse.
Olivier Ezratty, conseil pour les entreprises dans l'élaboration de leurs stratégies d'innovation et très actif dans l'écosystème des start-ups (il publie chaque année le Guide des start-ups et le Rapport du CES de Las Vegas) propose de revenir sur les usages de l'IA et sur la manière dont celle-ci va transformer la société, le travail et les métiers de demain.


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Dans ce séminaire, Bernard Stiegler poursuit sont de l'exorganogenèse de l'urbanité. Il décrit ainsi la transformation des organes exosomatiques s'agrégeant pour former les exorganismes complexes : les villes, les usines et leurs relations, qui se substituent au lien entre villes et Eglises. Les territoires urbains acquièrent ainsi à l'époque industrielle des traits nouveaux - caractéristiques de l'Anthropocène.
Quelle était la fonction de l'Eglise ? Vieille question sur laquelle Bernard Stiegler revient à l'époque où nous croyons devoir projeter une finalité dans l'Anthropocène et contre l'anthropie en quoi il consiste.
Il faut ici rappeler la finalité de ce séminaire : il s'agit de projeter une sortie de l'Anthropocène, c'est à dire une perspective vers le Néguanthropocène, par la reconstitution d'une macro-économie guidée par ce que nous appelons la néguanthropie comme critère définitoire de la valeur.
L'économie de la néguanthropie, ou anthropie négative n'est pas simplement la translation de l'entropie négative telle que Schrödinger tente de la penser dans l'organique. Le passage à l'exorganique nécessite en effet une reconceptualisation qui dépasse les concepts de néguentropie dans le champ technologique, tels qu'ils sont issus de la théorie de l'information.
Ces conditions exorganiques passent par la question du droit telle qu'elle est liée aux conditions de transformation de la mémoire, et à la circulation de ce que l’on appelle depuis moins de deux siècles l' “information”. Elles donnent à considérer nouvellement la place de l'art, le rôle des archives et leur centralité, la réticulation intra-urbaine et extra-urbaine, telle que s'y produisent des relations d'échelles qui, à notre époque, sont au cœur des "plateformes" devenant biosphériques en mettant en œuvre des technologies de scalabilité.


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Le système mondial repose désormais intégralement sur les technologies numériques. Une conséquence majeure de cet état de fait est l’intégration fonctionnelle des mnémotechnologies au système de production des biens matériels, ce qui constitue une immense rupture historique : ce sont les dispositifs de production des symboles qui sont désormais totalement absorbés par l’organisation mondiale du commerce et de l’industrie. Les industries culturelles se sont emparées des dispositifs rétentionnels et configurent le temps dans sa forme la plus pure : comme flux de conscience.
C'est en suivant, actualisant la phénoménologie husserlienne et en l'appliquant à l'étude du cinéma que Bernard Stiegler nous montre l’importance de la compréhension du processus d’extériorisation technique de l’imagination qui permet le devenir industriel de l’activité de l’esprit et, partant, sa soumission exclusive aux critères marchands de sélection.


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