Né en 1880 à Klagenfurt, Robert Musil devient ingénieur et commence à écrire des monographies techniques consacrées à la mécanique et au chauffage. Il écrit son premier roman en 1906 : Les Désarrois de l'élève Törless qui inspira en 1966 le très beau film de Volker Schlöndorff.
Sa vie dès lors se confond avec l'élaboration de son grand œuvre : L'Homme sans qualité qu'il laissera à sa mort en 1942 à Genève, inachevé.
Son œuvre met en scène des personnages ambivalents, conscients d'une faille, en quête d'un équilibre en dépit d'un monde en mutation. La pensée de Robert Musil, polyvalente, subversive, créatrice, avide de la connaissance de soi et des autres est celle de l'homme moderne -libre- porté par la volonté d'une résistance moderne qui récuse les illusions et les faux-semblants.
Emission animée par Jean Daive et Jean-Claude Loiseau.
Ernst Jünger semblait indestructible. Blessé sept fois, combattant en première ligne dans les tranchées allemandes durant quatre longues années, il a survécu à la plupart de ses contemporains, en vivant jusqu'à l'âge de 103 ans. Jusqu'à la fin de sa vie, il demeurera un personnage très controversé en Allemagne, où on lui reproche son idéologie d’extrême-droite.
Car il fut proche du parti Nazi jusqu'en 1933, date de l’arrivée d'Hitler au pouvoir. Insaisissable, il refuse les avances de Goebbles qui veut en faire un député NSDAP. Dans le même temps, il rédige Le Travailleur, un livre aux idées anti-démocratiques. Durant la guerre, il sera au courant du complot contre le Führer sans jamais dénoncer personne.
Qui était donc Ernst Jünger ? Il se définissait comme anarque, c'est-à-dire en retrait. En exil intérieur.
Emission "Une vie, une oeuvre", animée par Matthieu Garrigou-Lagrange.
Au cours de ces quinze dernières années, W.G. Sebald est devenu l'un des auteurs majeurs de la fin du XXe siècle, mondialement traduit. Son entreprise littéraire est une tentative de saisir l'évanescence des traces pour les transformer en un phrasé résistant à l’oubli. Et comme nous le rappelle Emmanuelle Loyer, Claude Lévi-Strauss est l'une des références explicitement citées par Sebald.
Quand bien même elle n'existerait pas, la déambulation rêveuse dans un monde saccagé d'un narrateur sebaldien, en proie aux doutes, à la dépression et parfois à la torpeur, la précision de l'onomastique naturaliste, le souci de l'Histoire et l'attention géographique au paysage rappellent le protocole littéraire de Tristes Tropiques en particulier.
À travers ce rapprochement, Emmanuelle Loyer attire l'attention, entre autres, sur un des horizons du travail littéraire de Sebald, également à l'œuvre sur le plan de la poétique savante chez Lévi-Strauss : une commune nostalgie à l'égard des "Belles Lettres", un régime de vérité où littérature et sciences sont indistinctes avant que le XIXe siècle ne produise un découpage des savoirs qui fut aussi un découplage.
Jacques Chancel nous propose une rencontre avec l'écrivain, le conteur et l'historien des chemins de fer qu'est Henri Vincenot. Cet amoureux de la Bourgogne et de la vie campagnarde revendique l'usage du parler local dans la langue française, et c'est en revenant sur son parcours qu'il nous explique le sens de son travail d'écriture.
Ses propos sont d'ailleurs bien autre chose qu'une simple conversation : il s'agit d'une méditation sur le Progrès, cette logique implacable qui détruit le vieux monde, celui que nous raconte encore Henri Vincenot.
Poète, romancier, dramaturge, essayiste, il reçut le prix Nobel de littérature en 1948. Deux œuvres majeures racontent cet auteur mélancolique pour lui et pour le monde : La terre vaine, dont il dit que c’est l’image de son premier mariage, et les Quatre quatuors, méditation poétique sur le temps et l’éternité, qui comporte le tracé d’une renaissance intérieure.
Mais qui fut-il vraiment ? Comment un Américain de Saint Louis débarque-t-il à Paris en 1910 avant de gagner la Grande-Bretagne, d'y devenir anglais, anglican, d'y fonder la revue The Criterion, d'y illustrer la résistance de l'esprit sur les ruines de la Seconde Guerre mondiale ? Et pourquoi ce génie, moderne parce que classique, mais longtemps condamné à la méfortune avec les femmes, ne se voulut-il jamais qu'un simple paroissien ?
Stéphane Giocanti nous restitue la trajectoire énigmatique de l'une des figures majeures de la modernité artistique. Car à travers un monde en poussières, ce sont les débats philosophiques, littéraires, politiques de notre proche passé quis sont ressuscités.
Une conférence de l'Observatoire de la modernité.
Observateur des plus grandes catastrophes, Léon Bloy s'est intéressé à son temps pour chercher inlassablement à y déceler les signes de l'Apocalypse qu'il attendait.
De même, sur le plan littéraire, ce "pèlerin de l'absolu" qui prétendait porter sur sa figure ses propres livres, s'est placé résolument à l'écart des courants contemporains : il n'écrivait que pour Dieu.
En dépit de ses revendications d'anachronisme, Léon Bloy reste cependant un écrivain représentatif de son temps. Une spiritualité intransigeante et inquiète, une profonde intelligence du symbole, un imaginaire violent et tourmenté habitent cet auteur longtemps rangé sous la rubrique des pamphlétaires et qu'il faut aujourd'hui redécouvrir.
Émission "Une vie, une oeuvre", animée par Jean Daive.
Qui sont les antimodernes ? Non pas les conservateurs, les académiques, les frileux, les pompiers, les réactionnaires, mais les modernes à contre-cœur, malgré eux, à leur corps défendant, ceux qui avancent en regardant dans le rétroviseur, comme Sartre disait de Baudelaire.
Antoine Compagnon poursuit le filon de la résistance à la modernité qui traverse toute la modernité et qui en quelque manière la définit, en la distinguant d'un modernisme naïf, zélateur du progrès.
Après avoir exposé les grands thèmes caractéristiques du courant antimoderne aux XIXe et XXe siècles (la contre-révolution, les anti-Lumières, le pessimisme, le péché originel, le sublime et la vitupération), Antoine Compagnon revient sur le parcours de certains écrivains emblématiques pour montrer, justement, ces traits idéaux.
Entre les thèmes et les figures, des variations apparaissent, mais les antimodernes ont été le sel de la modernité, son revers ou son repli, sa réserve et sa ressource. Sans l'antimoderne, le moderne courait à sa perte, car les antimodernes ont donné la liberté aux modernes, ils ont été les modernes plus la liberté.
C'était un homme indestructible : blessé sept fois, combattant en première ligne dans les tranchées allemandes durant quatre longues années, il a survécu à la plupart de ses contemporains, en vivant jusqu’à l’âge de 103 ans. Jusquàà la fin de sa vie, il demeurera un personnage très controversé en Allemagne, où on lui reprochait son idéologie d’extrême-droite.
Car il fut proche du parti Nazi jusqu'en 1933, date de l'arrivée d’Hitler au pouvoir. Insaisissable, il refuse les avances de Goebbles qui veut en faire un député NSDAP. Dans le même temps, il rédige Le Travailleur, un livre aux idées anti-démocratiques. Durant la guerre, il sera au courant du complot contre le Führer sans jamais dénoncer personne.
Qui était donc Ernst Jünger ? Il se définissait comme anarque, c’est-à-dire en retrait. En exil intérieur.
Emission "Une vie, une oeuvre", animée par Philippe Barthelet.