Une série d'émissions en quatre temps pour comprendre la pensée de l'un des philosophes français les plus connus au monde :
1. Né en 1947, Bruno Latour nous expose le point de départ métaphysique de sa philosophie : le pluralisme des modes d’existence. De ses enquêtes de terrain en sciences sociales naît une question : de quoi la société est-elle faite ? Et de cette question naît l'élaboration de sa théorie des différents modes d'existence. Mais qu'est-ce qu'un mode d'existence ? Le réel est-il pluriel ? C'est dans le cadre d'une philosophie empirique que notre penseur inter-disciplinaire tente de décrypter le monde dans lequel nous vivons.
2. Si la science a organisé toute l'histoire de l'Occident, il faut pourtant remettre en question son autorité autoproclamée, tout en reconnaissant sa vérité objective, dans son mode. Comment résister à l'hégémonie scientifique ?
3. La modernité, pour Bruno Latour, est un mot d'ordre rempli de violence. Il faut en faire un objet d'étude anthropologique pour comprendre comment "l'Homme blanc" prétend faire et être ce qu'il n'est pas.
4. Comment l'écologie pourrait-elle entrer dans le mode d'existence politique ? Pourquoi est-elle la seule alternative crédible à notre modèle d'injonction à la modernité ? Mais pourquoi échoue-t-elle alors politiquement ?
Émission "Les Chemins de la philosophie", animée par Adèle Van Reeth.
Pour l'humanisme, l'humanité n'est pas seulement une espèce d'êtres vivants, homo sapiens, mais elle est une communauté morale et une valeur. Plus précisément, l'humanisme, au sens où l'entend Francis Wolff, implique trois thèses : l'humanité a une valeur intrinsèque ; l'existence des êtres humains a une valeur absolue ; l'humanité est source unique de valeurs. Ces idées ne vont pas de soi. "Avant l’homme" il y eut (et il y a encore, d'une certaine manière), le Dieu de la révélation ; et "après l'homme", pointe aujourd'hui la Nature. Selon ses deux rivales, l'humanité a certes une valeur, mais extrinsèque et relative, parce qu'il y a une source de valeurs supérieure dont dépend celle de l’humanité.
Concernant la première rivalité, Francis Wolff évoque ce qu'on a appelé la "sécularisation des Temps modernes", c'est-à-dire le processus par lequel la religion cesse, en Occident, d'être le repère central de la vie sociale (théocentrisme) pour gagner progressivement la sphère privée. Concernant la seconde rivalité, il s'agit de revenir sur les débats actuels autour de la valeur intrinsèque de "la nature" sous ses différentes formes (biocentrisme, écocentrisme, zoocentrisme) et l'actuelle position médiane du christianisme ("la vie humaine").
L'humanisme n'en reste alors pas moins le pire système... à l'exclusion de tous les autres !
L'inquiétude partagée que suscite la conscience des "potentialités apocalyptiques de la techno-science", selon l'expression de Cornelius Castoriadis, est fort compréhensible. Elle n'est toutefois d'aucun secours, ignorant le problème qui se pose dès que l'on s’interroge pour savoir qui peut apporter les réponses attendues et comment les mettre en œuvre ; c’est-à-dire dès que l'on se demande : que faire concrètement ?
Quiconque possède un brin d'esprit philosophique (et scientifique) et n'est pas trop aveuglé par les problèmes quotidiens et le dogme politico-économique de la croissance, ne peut qu'être frappé par cette lancinante rumeur qui semble à la fois tomber du ciel et remonter des entrailles de la Terre : une espèce zoologique singulière, Homo sapiens faber (V.Vernadskv), est devenue une nouvelle force géologique. L'humanité "civilisée", depuis la révolution thermo-industrielle, est désormais capable d'accélérer et de prendre la direction de l'évolution de toute la Biosphère. Mais n'est-ce pas jouer aux apprentis sorciers ?
La biologie moderne, en faisant triompher une conception moléculaire du vivant, a fait de l'ombre à l'essor, tout aussi fondamental, de la biologie environnementale et de l'écologie globale, la science de la Biosphère, ignorée par les sciences économiques et sociales. Malgré les illusions du Développement, l'expansion de la civilisation scientifico-militaro-industrielle heurte de plus en plus les limites de la Biosphère dont les sociétés humaines dépendent tout autant que n'importe quelles autres formes de vie.
- 0'00'30 : Qui êtes-vous ?
- 0'01'40 : Où sommes-nous ?
- 0'02'40 : Vernadsky
- 0'25'15 : De la biosphère à Gaïa
- 0'35'10 : La biosphère de l'anthropocène
- 0'45'00 : Nicholas Georgescu-Roegen
- 1'04'25 : Comment voyez-vous l'avenir ?
Sur son site partage-le.com, Nicolas Casaux développe un discours écologiste radical et propose une analyse résolument technocritique. L'occasion de partager une conversation autour du progrès et de ses méfaits, des "exigences des choses plutôt que l’intention des hommes", des éco-charlatans, du transhumanisme et du transgenrisme, mais aussi de féminisme, de littérature, de nature et de la quête vers l'autonomie.
La crise en cours remet à l'ordre du jour la volonté de transformer notre système productif de façon à le rendre plus protecteur et plus durable. Les bonnes volontés ne manquent pas, mais disposons-nous des outils et en particulier des outils intellectuels nécessaires ?
Il s'agit de prendre au sérieux la notion de développement durable : non seulement un développement qui se déploie à travers le temps, ce qui est une tautologie, mais qui construit de la durée et dont les principes mêmes – le capital, le travail, la technique – sont commandés par le sens de la durée. La question économique s'en trouve profondément renouvelée.
Une conférence qui s'inssère dans le cycle "Ralentissements" des discussions de la Chocolaterie.
Auteur et traducteur pour le site Le Partage et les Éditions Libre, Nicolas Casaux publie des analyses consacrées à l'écologie, l'activisme et la civilisation industrielle.
Il revient dans cet entretien sur son parcours de politisation, de l'anarchisme à la critique de la civilisation, où l'analyse sociale répond toujours au souci écologique.
Dans un second temps, c'est la critique de la société industrielle qui est développée plus en détails, en se demande s'il existe quand même, dans une optique primitiste, des technologies que l'on pourrait qualifier de démocratiques.
Alors que la question écologique recoupe depuis ses débuts la réflexion sur les équipements techniques et matériels permettant d'imaginer une condition terrestre contre les globalisateurs modernes et leurs projets cybernétiques de maîtrise totale du monde, nous nous habituons désormais au cocon numérique, y compris dans les milieux militants. Au nom du caractère pratique d'outils dont on ne questionne pas suffisamment les bases matérielles et les origines, du fatalisme ambiant ou de la pression sociale, ceux qui y résistent seront jugés inadaptés, victimes d' "illectronisme" ou de "technophobie", et invités à se soigner.
Pourtant, personne ne peut réellement croire les promesses selon lesquelles la transition numérique sera la transition écologique. Les gadgets numériques nous promettent des satisfactions à court terme, des plaisirs éphémères, des stimuli grossiers, c'est seulement dans un second temps qu’apparaissent les effets réels et à plus long terme, lorsqu'il est souvent trop tard.
Les objets comme le langage du numérique apparaissent aujourd'hui comme les principaux freins à l'instauration d'une condition terrestre véritable. Dès lors, comment penser la technocritique aujourd'hui ? Que faire de cet appareillage proliférant et de sa quincaillerie ? Peut-on se satisfaire d'un appel à libérer l'internet ou d'une promotion d'outils présentés comme libres ?
Les évolutions en cours accroissent la surveillance totale, l'épuisement des psychismes et des ressources, et installent un monde que peu de gens ont réellement désiré. Ce monde accentue notre dépendance envers un système marchand hyper-industrialisé, accroît la néodomesticité faite de livraison et de click, et relance le capitalisme industriel qu'on croyait pourtant épuisé.
A travers un retour sur les liens que l'écologie politique a entretenu avec la question des techniques, une exploration de la pluralité des lignes qui traversent le monde militant à ce sujet, et comment le capitalisme numérique actuel repousse les frontières de l'extractivisme, cette causerie invite à faire le point sur ce qui nous arrive et à explorer le champ des possibles.