Frédéric Lordon dénonce une Europe qui se construit sans les européens, dans le déni absolu de toute expression des souverainetés populaires. Or une union politique authentique présuppose de faire l’Europe autrement que par l’économie !
L’urgence économique et sociale commande alors de réexaminer de près l’option des monnaies nationales et de réaffirmer que défaire la monnaie européenne, de toute façon aussi mortifère que non-viable, n’exclut nullement de continuer à œuvrer pour l’approfondissement résolu de tous les autres liens entre les peuples européens...
Une réflexion salutaire qui bouscule un nombre non-négligeable de tabous au sein du camp de la "gauche critique".
Jean-Pierre Dupuy nous explique pourquoi, après avoir été l'un des principaux introducteur de John Rawls en France, il a rompu avec sa célèbre théorie de la justice.
En effet, les différents mécanismes sociaux servant à contenir les passions égalitaires ne font finalement que les déchaîner. Ainsi en est-il de la hiérarchie (Louis Dumont), de la démysthification (Pierre Bourdieu) et de la contingence (John Rawls) qui font toutes l'impasse sur la logique du mal absolu qu'est l'envie (l'amour-propre chez Rousseau).
C'est donc à un dépassement de l'idéologie victimaire que nous invite Jean-Pierre Dupuy, où les contextes faisant naître l'humiliation serait à combattre en premier lieu. Francis Wolff résume ensuite le propos de Jean-Pierre Dupuy et l'interroge sur les thèses qu'il avance.
Le verbe leste, l'argumentaire infaillible, les deux orateurs d'exception que sont Jacques Vergès et Marc Bonnant jouent de l'émotion et de la voix comme le ferait un musicien virtuose.
Leurs démonstrations ont valeur de plaidoiries touchant aux fondements mêmes de la défense : l'humanité de l'accusé pour Jacques Vergès, la rhétorique et l'amour de la langue pour Marc Bonnant.
Citant l'Antigone de Sophocle ou prenant les Dieux de la Grèce Antique à témoin, les deux géants du barreau partagent avec l'auditoire une majestueuse leçon de mémoire et d'histoire.
Quelle est la place d’une armée dans une vrai démocratie ? D'ailleurs, a-t-on réellement besoin d’une armée ? Si oui, comment le peuple peut-il contrôler cet organe de pouvoir qui a eu de cesse de s'autonomiser dans l'histoire récente ?
Etienne Chouard et Laurent Henninger (historien de la guerre) débattent de ces questions lors d’une rencontre qui introduisait un atelier constituant sur le même thème : avec quels mots un peuple peut-il à la fois instituer des forces armées pour le défendre, et s’en protéger ?
Par ailleurs, le sujet de la sécurité informatique (qui intéresse également les armées et les états pour surveiller, espionner et contrôler les peuples) est abordé en fin de conférence.
Une réflexion sur les droits de l'homme, et plus spécifiquement la notion d'universel opposée à l'universalisme.
En effet, le concept d'universel est d'abord apparu en Europe, et plus spécifiquement en Grèce dans le domaine de la science, sous l'Empire Romain pour le rapport au droit et à la citoyenneté (212, Edit de Caracalla) et finalement par le christianisme dans le domaine du salut et de la morale.
Dans quelle mesure les droits de l'homme peuvent-ils alors prétendre à l'universel ?
Pour les partisants de la discrimination positive, l'équité (c'est à dire l'inégalité compensatrice de traitement) est le moyen de parvenir à concrétiser un projet d'égalité.
Mais dans quelles limites ce projet doit-il se déployer ? Peut-on le circonscrire aux problèmes socio-économiques seulement, comme le défend Eric Keslassy ? Comment éviter le piège communautariste qui enferme les individus dans leur groupe d'appartenance en leur accordant des droits relatifs à leur sexe, à leur race ou à leur religion ?
Comme le rappelle Anne-Marie Le Pourhiet, ce projet nous éloigne de l'idéal républicain qui ne voulait reconnaître aucun corps intermédiaire entre le citoyen et la nation.
L'exemple désastreux des Etats-Unis doit nous pousser à réfléchir sur les implications d'un projet si généreux dans ses intentions, mais qui se révèle profondément pervers dans ses effets réels, une fois appliqué.
Blandine Kriegel nous montre, dans "La République et le Prince moderne. Les Français et la naissance des Provinces Unies", que les problèmes politiques ont des racines plus anciennes qu’on ne le croit généralement.
A une vision française singulièrement orientée sur l'épisode de la révolution française, Blandine Kriegel substitue une vision plus large en réintroduisant l'émergence de la question Républicaine au sein de l'histoire européene.
En étudiant le passage des "républiques de cité" aux "républiques d’etat" dans les Provinces-Unies (Hollande) au 16ème siècle, c’est aussi l’éventualité d’un nouveau renversement politique actuel que Blandine Kriegel envisage : une "Europe des républiques" pourrait-elle laisser la place à une "Europe républicaine" ?