Né en 1893 dans une famille bourgeoise, élevé entre un père et une mère qui se déchirent, étudiant malchanceux, soldat de la boue et des tranchées, suicidaire, amant constamment insatisfait, la vie de Pierre Drieu la Rochelle irrigue l'ensemble de son oeuvre littéraire.
Ses poèmes, ses essais, ses nouvelles, ses pièces de théâtre et ses romans racontent toujours une part de lui-même. Du Feu follet (1931) à Gilles (1939), en passant par La Comédie de Charleroi (1934) et Rêveuse Bourgeoisie (1937), le lecteur suit sa destinée à travers des pages magnifiques, mais souvent désespérées. Dans les années 1920, ses amis les plus proches se nomment Louis Aragon, Gaston Bergery, Emmanuel Berl et André Malraux. Mais, habité par le spectre de la décadence (décrit dans Mesure de la France), conscient de la nécessaire unité des patries européennes (développée dans L'Europe contre les patries) et chantre d'un socialisme viril, il n'hésite pas à se proclamer fasciste au lendemain des évènements du 6 février 1934. Une profession de foi (exposée dans Socialisme fasciste) qui le conduira, à se perdre dans les méandres de la Collaboration. Le 15 mars 1945, il met fin à ses jours.
Ceux qui l'ont connu surent souligner sa sensibilité, son élégance, son courage et son sens de l'amitié. Au fil des années ayant suivi son suicide, sa figure de dandy, errant sur les quais de la Seine, a donné naissance à un véritable mythe.
Émission du "Libre Journal de la jeunesse", animée par Pascal Lassalle.
Otto Rank, né Otto Rosenfeld le 22 avril 1884 à Vienne et mort le 31 octobre 1939 à New York, est un psychologue et psychanalyste autrichien. D'abord membre du premier cercle freudien, secrétaire de la Société psychanalytique de Vienne et membre du "comité secret", l'évolution de ses recherches lui vaut d'être exclu de l'Association psychanalytique internationale en 1930. Il est considéré comme un dissident du mouvement international.
Originaire de Vienne, Otto Rank est issu d'une famille de la moyenne bourgeoisie juive. Fils de l'artisan d'art Simon Rosenfeld, il est contraint, dans un premier temps, de travailler lui-même comme artisan et de renoncer aux études supérieures. Il prend le nom de Rank à l'âge de dix-neuf ans, en référence au bon Dr Rank de la pièce d'Ibsen, La Maison de poupée. Il lit à vingt ans L'Interprétation des rêves de Freud et écrit un essai que le psychanalyste Alfred Adler transmet à Freud. Il devient dès lors un psychanalyste du premier cercle et, en 1906, le premier secrétaire de la Société psychanalytique de Vienne et à ce titre, l'auteur des transcriptions des minutes de la société viennoise (conférences et d'échanges), de 1906 à 1918. En 1924, il publie Le Traumatisme de la naissance, s'intéresse à ce qui se trouve avant le complexe d'Œdipe et propose une vision différente de celle de la psychanalyse d'orientation freudienne. Sigmund Freud l'analyse brièvement jusqu'à fin décembre 1924 puis le rejette ; Rank se trouve exclu des cercles psychanalytiques freudiens.
En 1926, Rank s'installe à Paris, devenant l'analyste d'Henry Miller et d'Anaïs Nin, avec qui il a une courte liaison. Il voyage en Amérique, où il rencontre un certain succès. Il est invité notamment à la société de Rochester pour la Protection de l'enfance en danger où travaille alors Carl Rogers. Il est exclu de l'Association psychanalytique internationale le 10 mai 1930. En octobre 1939, il meurt à New York à l'âge de 55 ans, des suites d'une septicémie.
Émission "Une vie, une oeuvre", produite par Bénédicte Niogret.
George Soros est une légende. Multimilliardaire, l'homme a construit sa fortune par sa grand habileté sur les marchés financiers. Tant redouté qu'écouté par ces derniers, il a par ailleurs su se rendre indispensable auprès des grands de ce monde. Du camp Démocrate américain à l'Union européenne, des dirigeants africains à l'Université qu'il fonda en Hongrie, ses conseils et sa générosité englobent les domaines politique, économique et sociétal.
Car l'originalité de Soros, c'est avant tout d'avoir été l'un des premiers à être à la fois financier et philanthrope. Au travers de son ONG, l'Open Society, il se bat en effet pour construire des démocraties dites inclusives et dynamiques, au profit d'une société dite ouverte et progressiste.
Pourtant, malgré ses nombreux apports et bienfaits qu'on dit avoir été prodigués à l'ensemble de l'humanité, George Soros reste sous le feu nourri des critiques des "populistes" de tous bords. Comment l’expliquer ? Thibault Kerlirzin nous propose quelques clés pour y répondre.
Émission "La Méridienne", animée par Wilsdrof et Tesla et Beluga.
Retour sur l'expérience des "établis" en compagnie de Robert Linhart qui nous fournit par là le récit d'un intellectuel employé comme ouvrier dans une usine Citroën en 1968, le sien. Un témoignage exceptionnel qui revient sur certaine époque et son militantisme d'extrême-gauche maoïste.
Émission "Hors-champs", animée par Laure Adler.
Né en 1908 à Bruxelles, Claude Lévi-Strauss grandit à Paris dans une famille de peintres. Chez lui, on chante Offenbach par cœur et on va à l'opéra même quand on n'a pas beaucoup d'argent. Pendant ses vacances dans les Cévennes, il se passionne pour la géologie, la nature, le camping.
Au début des années 30, il est un jeune agrégé de philosophie, qui a lu Marx et découvert Freud. Il est envoyé en province pour enseigner, mais c'est surtout son activité de militant socialiste qui le passionne. Il ressent par ailleurs le besoin de rompre avec l'enseignement traditionnel de la philosophie tel qu'il l'a reçu à la Sorbonne. Curieux de tout, il a envie d'embrasser le monde. C’est "un dimanche de l'automne 1934, à 9h du matin, sur un coup de téléphone" que tout se décide.
Il embarque pour le Brésil, invité à devenir professeur de sociologie à l'université française de Sao Paulo. C'est là, au cours de ses congés, qu'il entreprend ses premières expéditions à la rencontre des Indiens. Cette expérience est un baptême ethnographique, qui marque le tournant de sa carrière, et lui fournit la première matière de la révolution des sciences sociales qu'il s'apprête à mener.
De retour en France, les lois raciales de Vichy le contraignent à partir aux Etats-Unis en 1941 où il rencontre l'effervescence du monde de l'exil européen à New York, entre surréalisme et naissance du structuralisme.
Après-guerre, il revient en France et entreprend l'intense travail de l'écriture. Des décennies au cours desquelles Claude Lévi-Strauss réinvente l'anthropologie, discipline désormais affirmée, grâce à lui. En 1959, il est élu au Collège de France à la chaire d'anthropologie sociale.
Il publie La pensée sauvage en 1962, qui bouleverse la pensée occidentale sur les sociétés sans écriture : la frontière entre "elles" et "nous" s'estompe. La pensée n'est pas que dans le langage et la rationalité, elle est partout à l'œuvre.
Puis de 1964 à 1971, il publie son œuvre majeure, les quatre volumes de Mythologiques, une approche structurale des mythes, qui empruntent leur forme à la musique.
Avec l'œuvre de Lévi-Strauss, c'est une révolution du regard qui s'opère, une mise en perspective de tout ce qui nous fait en tant qu'individu et en tant que société.
D'œuvre en œuvre, il élabore ce "regard éloigné" qui nous fait prendre conscience que les notions que nous croyons les plus universelles sont encore le fruit d'une vision ethnocentriste du monde. Sa lecture est une expérience de transformation de soi.
Après avoir fortement influencé la recherche dans les années 60-70, la pensée de Lévi-Strauss est redécouverte aujourd'hui et révèle toute sa pertinence et son actualité.
Émission "Une vie, une oeuvre", produite par Irène Omélianenko.
Que sait-on vraiment de Karl Marx ? Le XXe siècle a été le siècle du marxisme sans Marx. Le XXIe siècle sera-t-il celui de Marx sans le marxisme ?
Avant d'être statufié, saccagé puis oublié, Marx a été poète et amoureux dans l'Allemagne romantique. Vibrant d'espoir dans le flux et le reflux des révolutions européennes. Plongé à corps perdu dans l'antre du Capital. Et imaginant, dans ses vieux jours, le monde qui est aujourd'hui le nôtre. Un Marx inconnu.
Une série documentaire produite par Christine Lecerf.
Septembre 1959, dans un HLM de Bobigny. L'été est caniculaire et il faut quelques verres de pastis à Albert Uderzo et René Goscinny pour trouver une idée : pour son premier numéro, le journal Pilote a besoin de nouveaux personnages. Goscinny avait déjà fait parler Lucky Luke et le Petit Nicolas, voilà qu'il crée Astérix. Le plus français de tous les Gaulois a pour co-créateur un homme de 33 ans... qui en a passé 23 à l'étranger.
Car si René Goscinny est né en France, il passe sa jeunesse en Amérique. Depuis l’Argentine d'abord et à New York ensuite, la France est exotique, fantasmée. Loin de l'Europe, ce petit Français juif expatrié échappe à la guerre. Ce n'est pas le cas de sa famille restée à Paris, pour partie assassinée dans les camps nazis. Pour surmonter ce malheur, peut-être, René Goscinny choisit de faire un "métier rigolo". Le dessin d'abord. Mais ses rencontres avec Morris, Uderzo et Sempé le font devenir scénariste, l'un des plus grands de la bande-dessinée.
Et pourtant… Scénariste de bande-dessinée est un métier qui n'existe pas. La bande-dessinée elle-même est méprisée, "une sous-littérature pour diminués mentaux", dit-il.
Le voilà, le fait d'arme de René Goscinny : avec Lucky Luke, Le Petit Nicolas, Iznogoud mais surtout avec Astérix et Pilote, lui, l'amuseur professionnel, le besogneux de la futilité, a mis les bandes-dessinées dans les mains des adultes. Non pas qu'ils n'en lisaient pas avant… Mais maintenant, ils l'avouent !
C’est Goscinny qui a mis sur les rails la bande-dessinée française. C'est lui qui a découvert et a laissé s'exprimer les Moebius, Druillet, Gotlib, Brétécher, Fred, Alexis, Reiser, Cabu, Mandryka, Patrice Leconte, Mézières, Christin et autres : il serait plus facile de dresser la courte liste des auteurs de BD qui ne sont pas passés par Pilote. Il fallait bien René Goscinny et son sourire en coin pour faire passer la bande-dessinée d'art mineur à neuvième art.
Émission "Toute une vie", produite par Romain Weber.
Henry David Thoreau, philosophe et naturaliste, part s'installer deux années durant dans les bois. Elisée Reclus, géographe, anarchiste et communard, plusieurs fois exilé, parcourt le monde.
Le géographe et le philosophe, observateurs des arbres, des pierres et des rivières, tous deux doués d'un vif sentiment de la nature, veulent "dépouiller le vieil homme, abolir un dégradant esclavage. (…) Simplifier radicalement le mode de vie des civilisés" (J. cornuault).
En promenade dans le bois de Phénix en Dordogne, nous cheminons au fil des mots et des idées de ces deux savants et poètes bien loin des figures de spécialistes qui émergent au XIXe siècle dans les milieux académiques corsetés par la séparation des disciplines.
Émission "LSD, La série documentaire", produite par Perrine Kervran.