Qui sont les intellectuels faussaires ? Sur quoi porte leur discours ? Quel est leur réel pouvoir intellectuel et médiatique ?
Toutes ces questions sont, parmi nombre d’autres, au cœur de la réflexion développée par Pascal Boniface dans son dernier ouvrage, Les Intellectuels faussaires (éditions Claude Gawsewitch, 2011).
L’auteur y décortique l’idéologie qui sous-tend le discours de cette "nouvelle catégorie" d’intellectuels hybrides qui sature, par sa présence, l’espace médiatique et intellectuel, et pèse du même coup sur le sens de l’information.
Depuis son premier succès médiatique -l’opération "Nouveaux philosophes" en 1977- l’imposture Bernard-Henri Lévy a maintes fois été analysée. De grands philosophes comme Gilles Deleuze ou Jacques Rancière ont très tôt su trouver les mots justes pour dénoncer la profonde "nullité" de la "Pensée-BHL", mais aussi pour comprendre les ressorts du "système" qui rend possible son succès.
Il a cependant fallu attendre ces dernières années pour que des enquêtes sérieuses soient menées sur "l’homme", qui apportent un éclairage utile sur "qui parle" lorsque "Bernard-Henri Lévy" écrit, télédiffuse et éditorialise... Plus précisément, ces enquêtes apportent des éléments de réponse intéressants à un vieux questionnement marxiste : "d’où" parle-t-il, cet "écrivain" qui prétend succéder à Voltaire, Zola et Jean-Paul Sartre dans le rôle du "grand-philosophe-français" ?
Nicolas Beau et Olivier Toscer est sans doute mené la plus accablante de ces enquêtes. À partir d’éléments factuels vérifiables, elle nous dresse un portrait édifiant : l’homme qui, à longueur d’essais, éditoriaux et interviews, ne cesse de dire le bien, le beau et le juste, apparaît comme un véritable tyran du microcosme éditorial, capable d’user de chantages et de menaces pour faire taire tout journaliste critique sur l’une de ses œuvres ; un homme de réseaux qui cumule les "titres", les "fonctions" et les sources de revenus dans le monde journalistique et culturel (auteur, éditorialiste, directeur de collection, membre de "conseils de surveillance", "comités éditoriaux") alors que le chômage et la précarité font de plus en plus de ravages chez les journalistes, les artistes et les intellectuels ; un hommes d’affaires avisé qui gère d’une main de maître le capital faramineux dont il a hérité de son père, et que ni sa "philosophie", ni son "éthique" ni sa conscience politique n’empêchent de mentir sur ses revenus et de frauder le fisc - ou, inversement : un homme qui peut frauder le fisc et continuer malgré cela de faire la leçon à tout le monde (et en premier lieu aux classes populaires quand elles luttent contre la précarité et pour de meilleures conditions d’existence) ; un homme enfin que ni sa "philosophie", ni son "éthique" ni sa conscience politique n’ont empêché de diriger une entreprise (la BECOB) dénoncée par une ONG comme l’une des pires entreprises de déforestation de l’Afrique, traitant ses employés africains comme des "semi-esclaves" - ou inversement : un homme qui peut se comporter ainsi en négrier et continuer malgré tout de faire la leçon à tout le monde.
L’idéologie antitotalitaire en France (1968-1981).
Ce livre important, d’un émule de Tom Paxton, permet de mieux comprendre la réalité de notre histoire idéologique récente et par-là l'état de la vie intellectuelle hexagonale.
Une mise en perspective salutaire et indispensable pour comprendre la profonde déréliction dans laquelle les luttes sociales ont sombré.