La technique semble désormais empiéter sur tous les domaines de l'activité humaine. La science se transforme en technoscience. La morale se fait gestion des ressources et management. La parole est livrée aux techniques de communication ; l'amour, au Kâma-Sûtra. Il n’est pas même jusqu'à l'évangélisation qui ne soit atteinte : on la conçoit aisément comme la nécessité d'allier Facebook à la Sainte Face, et Twitter à l'Esprit Saint. Il ne s'agit plus d'être, mais de faire (l'amour ou un beau discours). Mais un faire qui ne se fonde plus sur l'être ne peut en vérité que défaire, et sa volonté de puissance cache une impuissance radicale, qui asservit au lieu d'élever, qui manipule au lieu d'engendrer.
L'enjeu du cours de Fabrice Hadjadj est donc, avec Aristote et saint Thomas, de distinguer la technè (faire), de la praxis (agir) et de l'epistèmè (savoir), pour montrer en quoi le savoir-faire n'est pas d'abord un savoir, et en quoi la perfection de l'art ne se situe pas sur la même ligne que la perfection morale : la confusion, aussi bien que la séparation de ces trois espèces de vertu, est désastreuse.
Il montre également comment s'est opéré le passage de la technè des Anciens à la technique des Modernes, pour essayer de penser l'empire technocratique de notre époque (qui ne semble d'ailleurs plus une époque, mais un délai).
Ce sont bien les écrans qui font écran, en dépit de leurs nombreuses "fenêtres" et "icônes", et nos GPS qui nous égarent systématiquement, quand il s'agit d'être simplement ici...
Les Choristes, Bienvenue chez les Ch'tis, Intouchables, Qu'est-ce qu'on a fait au bon dieu ?, La Famille Bélier… À défaut d'intéresser la critique et l'histoire des formes cinématographiques, les derniers grands succès du cinéma populaire français constituent-ils, au moins, de bons thermomètres de la France d'aujourd’hui ? Ou bien des écrans de substitutions à une certaine réalité politique et sociale ?
Une conférence qui s'inscrit dans le cycle "Liberté, Egalité, Fraternité."
"Je ne veux plus qu'une chose : la fin", confesse Wotan dans La Walkyrie. On ne saurait comprendre ni le désir qu'a le dieu de sa propre fin, ni l'aspiration d'Isolde à l'anéantissement, ni même l'étrange savoir que la compassion révèle à Parsifal, sans l'influence décisive de la philosophie de Schopenhauer (1788-1860) sur l'art de Richard Wagner. Depuis sa découverte du Monde comme volonté et représentation en 1854 aux dernières mesures de Parsifal, Wagner ne cessera de reconfigurer son œuvre et sa pensée dans le sens de l’esthétique, de l'ontologie et de la morale schopenhaueriennes.
Mais l'artiste devint-il pessimiste et ascétique comme l'exigeait cette philosophie ? Fut-il saisi par cette volonté de néant que nécessite la rédemption ? Rien n'est moins sûr, chez Wagner, que l'ascèse et le renoncement. L'ambiguïté est grande dans ce rapport passionnel du plus philosophe des musiciens à une philosophie qui avait conféré à la musique un rôle proprement métaphysique.
Le cinéma et la cinéphilie sont-ils entrés en crise ? Le septième art est-il encore un espace commun ?
Alors que la bulle médiatique formate de plus en plus journalistes et discours, l'historien et critique et du cinéma Jean-Baptiste Thoret, le "dernier des cinéphiles", fait l'état des lieux d'un art qui a tout à la fois cessé d'être populaire et exigeant.
Alors que Michel Marmin publie ses chroniques intempestives de Cinéphilie vagabonde, dans lesquelles il partage vingt années de (re)découvertes, et que Guillaume Travers assure la direction, en compagnie d'Alain de Benoist, de l'ouvrage depuis peu disponible de la Bibliothèque du jeune européen qui introduit à 200 essais qui ont marqué la pensée du Vieux Continent, l'occasion était toute trouvée de les rassembler afin de déambuler dans les couloirs du 7e art et de la pensée européennes, qui recellent tant de trésors.
Un exercice d'admiration autant qu'une invitation au ressourcement.
Émission du "Libre journal de la nouvelle droite", animée par Thomas Hennetier.
Envers et contre elle, Annie Le Brun traverse l'époque. Elle occupe ce point où sensible et politique, littérature et subversion, restent indissociables. L'expérience du surréalisme dont elle témoigne est tout le contraire d'un mythe, le contraire d'un passé. On y entend le vif des rencontres et de le plein des singularités, la puissance du collectif quand il chemine vers l'inconnu. Autant dire que sa manière de soutenir les désirs, de chasser toute tendance à la résignation ou de faire entendre la joie d'être ensemble, continue à résonner en nous.
On parlé ici d'esthétique critique, de communisme des ténèbres et de ces lignes de crête sur lesquelles il faut se tenir pour rester inaccaparé. Ou encore, de ces "réserves monstrueuses de beauté" dans lesquelles puiser pour "se garder de reculer et de subir".
Le kitsch n'est plus ce qu'il était. De style décrié, dévolu à un univers décoratif marqué par le manque de goût, il s'est métamorphosé en néokitsch "branché", systémique et planétaire. Il était associé à la décoration intérieure bourgeoise, aux bimbeloteries, aux images sulpiciennes : le voici qui s'infiltre dans les urbanismes pastiches gigantesques, les mégacentres commerciaux, les parcs de loisirs, les défilés de mode, le showbiz, les soaps télévisés, le design, la communication virtuelle sur les réseaux.
Désormais proliférant, démesuré, envahissant de plus en plus de secteurs, un nouveau cosmos kitsch s'affirme, qui dépasse de beaucoup la sphère des propriétés formelles des choses et des images tant il contribue à dessiner une forme de civilisation : la civilisation du "trop".
Émission "Idées", animée par Pierre-Edouard Deldique.
Dans cet entretien réalisé en mai 1975, Edgar P. Jacobs, vraie légende de la "ligne claire" et créateur de Blake et Mortimer, accordait à François Rivière et Olivier Martial Thieffin un long entretien, véritable voyage dans sa mémoire intime, récit de sa geste d'artiste et évocation de plus d'un demi-siècle d'histoire du neuvième art.
Après être revenu sur son enfance, sa jeunesse et l'amorce d'une double carrière graphique et lyrique, il revient longuement sur sa trajectoire dans l'univers de la bande dessinée.
Émission "Mauvais Genres", animée sur François Angelier.